Gagner son pain quotidien relève d’un parcours du combattant dans la capitale tchadienne. Jeunes et vieux s’adonnent au jeu de la loterie espérant gagner leur pitance journalière malgré les effets négatifs.
Debout sur ses pieds, dans sa chemise à la couleur bleu ciel et ample, les yeux sur l’écran de jeu posé à l’angle droit de la salle lumineuse. Chance* reste calme et impatient malgré les bruits dans la salle de jeu. Confiance et sérénité restent à observer. Le résultat de son jeu s’annonce. Entre le désir de réaliser son rêve et le cauchemar de tomber dans la perdition, le cœur de Chance bat et encore.
L’écran prend une couleur blanche affichant les cases de résultat. Les numéros du jeu tombent un à un. Il vient d’obtenir quatre numéros et lâche un petit sourire accompagné d’une interjection « Oh! Dieu est grand ». Le temps de regarder à ses côtés, d’autres joueurs dans la salle l’entourent et attendent le dernier numéro qui tarde à s’afficher.
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L’homme à la vingtaine s’exclame : « Merde!» Il baisse la tête et reste muet sous les paroles d’encouragement de ses camarades. En fait, il vient de perdre le jeu. Un air pensif, le silence gagne l’esprit de ce jeune. Rêve et espoir s’envolent et s’évaporent. L’optimisme et le rêve font place à la déception. « Que faire pour la ration alimentaire de demain?», s’interroge-t-il.
Comme lui, la plupart des N’Djamenois pensent gagner leur vie en jouant à la loterie. Dans le milieu jeune, cette pratique est quotidienne. Tout âge confondu, filles et garçons s’adonnent à ces jeux de chance. Restant dans la salle du jeu, à l’ombre sous les arbres, et dans différents kiosques de la ville de N’Djamena. Ces derniers évoquent des raisons diverses. Pour quelques-uns, le manque d’emploi et des activités génératrices de revenu au pays seront les causes. Pour d’autres « c’est un lieu de distraction et un jeu du hasard », confie Hassan vendeur de cola présent dans la salle.
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Le taux de cette fréquentation occasionne la prolifération des salles et des kiosques de loterie dans la ville. Cela entraine des conséquences proche et lointaine sur la population et en occurrence les jeunes. Selon le sociologue Mbété Félix Nangmbatinan, les conséquences de ces jeux de loterie sont nombreuses. « D’abord les conséquences proches, lorsqu’un enfant ou un jeune passe tout son temps devant ce jeu sans gagner il finira par trouver un dépotoir. Soit il cherchera à fumer, à consommer de l’alcool, la drogue Et si c’est une fille, elle s’intéressera au sexe. Et même la nuit, l’enfant aura un trouble de sommeil. Ce qui l’empêchera le lendemain de bien suivre les explications que donne l’enseignant. Ce problème jouera sur lui et aura de répercussion sur son résultat scolaire », explique-t-il.
« A la longue cela l’amènera à voler, car il lui faut de l’argent. Ce qui aboutira au comportement suicidaire qui peut débuter par les maladies, les secrétions, soit c’est la dépression, soit un accident de circulation », conclut-il.
*Chance: nom d’emprunt
Djimhodoum Serge, stagiaire
La ségrégation n’oppose pas seulement le nord au sud. Elle existe dans toutes les couches sociales du pays. Changeons de comportement au lieu de s’en tenir à des beaux discours qui n’apportent rien. Nos hautes autorités doivent donner l’exemple à suivre.