Dans une tribune intitulée “Mon candidat de 2024”, l’architecte-urbaniste Bekoye Doumdé Irénée développe ce qu’il attend de celui qui sera élu au cours de cette année pour présider aux destinées du Tchad. Il y aborde diverses thématiques. 

« Mon candidat n’aura aucune couleur régionale, ethnique ou religieuse ; il sera juste un Tchadien épris de Justice, un visionnaire pour un Tchad Etat-nation respecté, et surtout un Patriote »

J’ai décidé de ne pas commenter cette année le discours à la Nation du Chef de l’Etat, Son Excellence  le Président de la République, Mahamat Idriss Déby Itno, mais de donner le profil idéal de mon candidat aux futures échéances électorales. Je serai bref.

Je suis définitivement de ceux qui refusent que le nom « Tchadien » soit associé à la guerre, à la délinquance économique, à la corruption, au dernier de presque tous les classements qui existent, à certains sondages qui nous flattent d’être dans le Top 5 des grands buveurs d’alcool ou d’être parmi les grands bandits et criminels du monde.

Je commence par la première action de mon Candidat qui, sans doute, sait qu’un peuple désuni ne pourra ni se développer ni prospérer. Y a-t-il espoir ? Oui, je le pense, à travers le sport et la musique. Les derniers exploits des Sao en Basketball, en Football (Coupe de la CEMAC 2014), au Tir à l’Arc, à la Pétanque, au Judo, etc. suffisent pour nous rassurer que les Tchadiens, peu importent leurs appartenances politiques, communautaires, religieuses, sont fiers et se montrent plus solidaires de nos dignes représentants.

Héritières d’un grand héritage culturel assorti d’un patrimoine musical riche et varié, aujourd’hui, les mélodies tchadiennes font danser plus d’un sur les réseaux sociaux, particulièrement sur Tiktok. La génération actuelle est pétrie de talent, mais elle manque fâcheusement d’orientations et d’appuis. Mon Candidat décidera de faire rayonner ce pays sur les grands plateaux de sport et des arts, en commençant, durant son premier mandat, par ce que les Tchadiens savent faire le mieux pour le moment : le Basketball et la Musique.

Ensuite viendront les grandes questions de développement. Mais dans ce répertoire, la Ville apparait désormais comme le vrai moteur de développement d’un Pays. Mon Candidat devra commencer à doter, avec l’apport exclusif des techniciens tchadiens (Urbanistes, Architectes, Ingénieurs de tout bord…), nos villes d’outils adéquats de planification et d’opérationnalisation, pour rendre celles-ci plus prospères, mais fondamentalement résilientes aux catastrophes naturelles. Le SDEAU (Schéma d’Aménagement et Urbain) est un outil dont la conception et la mise en œuvre sont complexes pour nos pays au Sud du Sahara ; ce sera le moment, pour notre pays, longtemps considéré comme un gibier, d’écrire sa propre histoire, contrairement aux dictats du chasseur habituel… Nous construirons, sous la vision éclairée de mon Candidat, des villes uniques et fières de leur passé, des villes résolument tournées vers la prospérité. A titre d’exemple, N’Djamena, dans son état actuel, est tout sauf une ville. Elle est, en effet, une juxtaposition de rares aménagements au gré de celui qui se sent fort dans sa sphère d’influence. Et, par l’ironie de l’histoire, le passé culturel et historique de nos villes a disparu au profit de la prétendue Modernité. Pourtant, il n’y a pas d’antagonisme entre Modernité et culture. Au contraire, leur conjugaison permet de faire des villes avec une identité particulière et offrant aux habitants un mieux-être et un bon vivre unique. Sinon, nous ne serons pas aujourd’hui entrain de regretter le Camp KOUFRA avec son mythique portique d’entrée qui a disparu pour laisser l’espace à ladite Place de la Nation, en réalité, déniée de toute valeur culturelle et identitaire.

De Faya-Largeau à Sarh (Ex Fort Archambault), en passant par Abéché, Ndjamena (Ex fort Lamy) et Moundou, les Tchadiens doivent être fiers de retrouver les symboles anciens comme caractéristiques de nos villes. Aujourd’hui, vous pouvez sortir et rentrer à Ndjamena sans remarquer ce mouvement d’aller-retour. C’est pour cela que mon Candidat confiera la conception des portiques d’entrée de nos villes aux Architectes, lesquels sont habilités à en faire des joyaux (pas l’expression Joyau Architecturale des Hommes politiques). Nos villes pourront ainsi accueillir, avec leur grandeur et leur histoire, les visiteurs qui les parcourent. J’ai trop à dire dans ce domaine car mon Candidat a plus de 1000 Architectes tchadiens disponibles, des Urbanistes, des Ingénieurs et d’autres professionnels techniques, mais je m’arrête là.

Sur le plan de la gestion de la res publica, mon Candidat comprendra que le Tchad, loin des refrains alarmistes scandés par des esprits négatifs et négativistes, est un ilot de ressources (humaines, naturelles, etc.) qui ne demandent qu’à être exploitées avec rationalité, sans considération tendancieuse aucune. Mon Candidat saura imposer l’accountability comme critère de gouvernance, afin que rien de ce qui relève de la sphère publique ne se fasse dans l’opacité la plus totale et la plus déconcertante. Il devra ainsi nous faire embrasser, d’un amour sans faille, l’excellence comme voie royale de changement. Et le Tchad, ce beau pays nôtre, entamera son ascension et s’extirpera, progressivement mais sûrement, du wagon du sous-développement dans lequel il est empêtré.

Sur le plan social, je vous donne le modèle de citoyen que mon Candidat voudrait voir en grand nombre au Tchad : Ali Abderahaman Haggar ou Abakar Bichara dit EBEKER de Happiness Center. Voilà des citoyens heureux et épanouis, c’est mon avis.  J’ignore probablement, si un seul instant dans leur chambre, ils regrettent d’être Tchadiens. Je ne pense pas, car A. HAGGAR aime dire à ceux qui sont déçus de ce pays : « Ne changeons pas de pays mais changeons le pays… ». Alors, si un jour tous les Tchadiens arrivent à surpasser leurs différences (une richesse) pour s’unir dans la paix et l’amour, ce pays pourra enfin retrouver sa place méritée dans le concert des Nations.

Ce message est en réalité une prière quotidienne et mes propositions dans l’analyse du discours à la Nation du Chef de l’Etat en 2023 restent d’actualités.