Depuis les terres arides du village de Doumougou, niché dans le canton Soumraï de la Tandjilé, émerge une voix poignante qui résonne avec les plaintes de sa communauté. Né vers 1984 sous le nom de Goukouni Madet, mais mieux connu sous son nom d’artiste, Doulbarid, ce cithariste a consacré sa vie à donner une voix à ceux qui n’en ont pas, à travers les cordes de sa cithare.

Depuis 1997, Doulbarid a manié les notes avec une dextérité croissante, passant de l’utilisation d’un seul doigt à une symphonie de cinq doigts qui danse sur les cordes de son instrument. “Au départ, j’utilisais un seul doigt pour jouer de la cithare, mais de fil en aiguille, je suis arrivé à utiliser deux, trois et quatre pour arriver actuellement à tous les cinq doigts“, explique-t-il modestement.

Mais derrière chaque note se cache un cri de désespoir, une lamentation pour les souffrances endurées par sa communauté. C’est la pauvreté criante qui a poussé Doulbarid à embrasser la musique comme un moyen de partager les défis et les peines de son peuple. “La situation de pauvreté accrue que vit la population de Doumougou, voire tout le canton Soumraï, m’a profondément touché“, avoue-t-il.

À ce jour, Doulbarid a composé cinq morceaux, chacun est un récit poignant des luttes quotidiennes. Ses chansons évoquent le manque cruel d’un hôpital adéquat, l’absence d’eau potable, les conflits perpétuels entre agriculteurs et éleveurs, et même la désolation des terres stériles. Mais son message va au-delà de la simple dénonciation. Il cherche à inspirer le changement, à promouvoir la tolérance et la paix entre les communautés. “Je sensibilise les agriculteurs et éleveurs au vivre ensemble, à cultiver la tolérance, la paix et à s’asseoir ensemble pour régler à l’amiable les conflits liés à la dévastation des champs“, déclare-t-il avec passion.

Cependant, les défis qu’il décrit ne se limitent pas à ses paroles. Doulbarid lui-même est confronté à des obstacles physiques, comme le périlleux voyage entre Doumougou, Laï et Kelo, ainsi que la menace constante de ravage par les criquets sur les maigres cultures de sa région. Mais il reste déterminé à faire entendre sa voix. “Ce sont toutes ces choses que je dénonce dans mes chansons pour amener les gouvernants du pays ainsi que les ressortissants de la Tandjilé en entier à penser à cette province productrice de l’or blanc qui est le riz“.

Dans un monde où les paroles peuvent parfois sembler vaines, Doulbarid utilise sa musique pour rappeler à tous que chaque voix compte, que chaque note peut être un appel à l’action. Et dans les accords de sa cithare, il trouve l’espoir d’un avenir meilleur pour sa bien-aimée Tandjilé.