De 2005 à nos jours, les Tchadiens ont connu dix Premiers ministres. Huit sous le président, Idriss Deby Itno et deux sont nommés par le président actuel de transition, Mahamat Idriss Deby Itno. Leur passage a été marqué pour la plupart d’une crise politique, sociale, ou sécuritaire. Voici les crises qui ont ébranlé les chefs du gouvernement ces 18 dernières années.

Saleh Kebzabo.  Le 10 octobre 2022, le président de transition, Mahamat Idriss Deby Itno fait de Saleh Kebzabo son Premier ministre. Dix jours après sa nomination, l’opposant historique au feu président, Idriss Deby Itno, fait face à une manifestation dans plusieurs villes du pays. Les manifestants s’opposent à la prolongation de la transition de deux ans. Une première crise qu’il doit gérer.  Des forces de l’ordre sont déployées en ville. Elles dispersent les contestataires dans le sang. Officiellement, 73 personnes ont trouvé la mort.  Pour les organisateurs, c’est au moins 300 morts.

D’autre part, le nouveau chef du gouvernement est secoué par la montée des eaux des fleuves Chari et Logone. Conséquence : des milliers de personnes sont contraintes de fuir leur domicile englouti par les eaux. Des voix se lèvent et accusent le gouvernement de ne rien faire.

Mi-avril, l’unique raffinerie du Tchad entre en maintenance. L’arrêt des machines provoque une rareté accrue des produits pétroliers au Tchad. Le prix de l’essence a pratiquement triplé avec les vendeurs à la sauvette. Une pénurie qui a engendré une crise sociale sans précèdent et le gouvernement de Saleh Kebzabo est accusé de ne pas avoir anticipé les choses.

Le président de l’Union nationale pour développement et le renouveau (UNDR) est loin d’être le seul Premier ministre à traverser une crise. Remontons le temps. Nous sommes en 2005. Le gouvernement dirigé par Pascal Yoadimnadji suit de près le déroulement du referendum constitutionnel. Une modification de la Constitution qui va ouvrir la porte au président, Idriss Deby Itno de se présenter autant de fois qu’il le souhaite aux élections présidentielles. L’opposition et la société civile crient aux mascarades électorales et appellent à une journée de « deuil national ». Ce bras de fer entre le pouvoir de l’époque et la coalition des partis politiques pour la défense de la Constitution (CPDC) a ébranlé le gouvernement de Pascal Yoadimnadji.

Deux ans plus tard (2007), ce dernier tire sa révérence et Nouradine Delwa Kassiré Coumakoye hérite de son fauteuil. A première vue, le nouveau Premier ministre a pour mission de remettre le pays sur les rails après les dégâts du groupe rebelle FUC sur N’Djamena en 2006 et surtout concrétiser les promesses du président, Idriss Deby Itno pendant la campagne électorale. A peine installé, Kascou est surpris par la crise des enseignants. Ces derniers lancent une grève sèche et boycottent la supervision du baccalauréat. Le gouvernement de Nouradine Delwa Kassiré Coumakoye confie alors la tâche aux militaires.

Au début de 2008, le chef du gouvernement est remplacé par Youssouf Saleh Abbas. Un homme discret et inconnu de bon nombre des Tchadiens. Immédiatement, Youssouf Saleh Abbas a été confronté à l’attaque du groupe rebelle UFR et UFDD. Durant leur incursion, l’opposant farouche au pouvoir de N’Djamena, Ibni Oumar Mahamat Saleh a été enlevé à son domicile par des hommes armées selon sa famille. Depuis lors l’homme politique n’a plus donné signe de vie. Youssouf Saleh Abbas fini par claquer la porte.

Son départ fait place à Emmanuel Nadingar. Annoncé qu’il ne tiendra pas longtemps, le militant de l’ex-parti au pouvoir, (Mouvement patriotique du salut), finit par faire trois ans. Une longévité tachée par l’une des plus longues grèves que le pays ait connue.  L’Union des Syndicats du Tchad demande l’augmentation de salaires des travailleurs et le gouvernement s’y oppose. Commence alors une grève qui va durer plus de 12 semaines paralysant tout le pays. Dans la même vague, des leaders syndicaux, notamment Barka Michel, Younous Mahadjir et François Djondang sont mis aux arrêts. Leur arrestation pour incitation à la haine fait grand bruit.

Après lui, il y a eu Joseph Djimrangar Dadnadji et Kalzeube Payimi Debeut. Le premier a mis dix mois comme chef du gouvernement avant de démissionner à cause de l’opposition à sa réforme de l’école. Le gouvernement du second a été secoué par la crise pétrolière entre le Tchad et la société Glencore.

En 2016, après l’élection du président, Idriss Deby Itno, Il propulse son adversaire, Pahimi Padacke Albert à la tête du gouvernement.  Aussitôt, ce dernier annonce les 16 mesures pour sortir le Tchad de la « banqueroute ».  Le salaire des travailleurs est amputé et éclate une crise sociale sans précédent. Malgré la colère des syndicats, Pahimi Padacket Albert garde son fauteuil.Il faut attendre en 2018 à l’issue du Forum national inclusif, pour le voir être éjecté de la Primature suite à la suppression de cette entité.

Le 20 avril, les militaires annoncent la mort du président, Idriss Deby Itno et leur prise du pouvoir. Six jours plus tard, le nouveau maitre de N’Djamena désigne Pahimi Padacke Albert comme Premier ministre. Il met 18 mois. Son équipe a fait face à plusieurs défis sécuritaires. Les évènements d’Abéché, Sandana, Kouri Bougoudi, les premières contestations contre la transition… ces évènements ont couté la vie à des centaines des Tchadiens.