Les effets du changement climatique dans la province du Lac accentués par les conflits et la covid-19 a plongé ces dernières années la population de cette zone du pays dans une précarité sans pareille. L’État et ses partenaires ont développé des initiales visant à atténuer les chocs.

L’assèchement du Lac-Tchad n’a jamais été aussi une réalité. L’ensablement a gagné toutes les zones exondées de la province du Lac. L’espace cultivable dans la plupart des villages jouxtant cet important lac d’Afrique a disparu laissant place à un sol érodé.

Aujourd’hui, hormis les polders et les quelques rares ouadis où une infime partie de la population continue à profiter d’un sol riche pour l’agriculture, la grande partie de la terre est infertile. « Vous avez vu vous-même que l’agriculture n’est plus possible dans nos villages. Le désert nous a envahi », s’alarme Ahmed Kerim, représentant du chef de canton Djigdaga.

Les phénomènes d’insécurité notamment les attaques terroristes qui sévissent dans la province du Lac et la récente épidémie à coronavirus ayant ralenti les activités économiques ont complétement douché l’espoir de la population. Des situations qui ont contraint les ressortissants de la zone à la reconversion ou carrément à la migration.

Depuis un an, le programme Conjoint Sahel en réponse aux défis de Covid-19, Conflits et Changements Climatiques au Tchad dénommé SD3C a distribué par le biais de ses partenaires de mise en œuvre (PAM et FAO) des petits ruminants aux ménages les plus vulnérables dans des centaines de villages du Lac en vue d’atténuer leur vulnérabilité.

Dans le canton Djebinntchi qui subit de plein fouet les affres du changement climatique, le programme a identifié 250 ménages vulnérables dont chacun a reçu 5 chèvres et 1 bouc. D’autres ménages dans les cantons environnant notamment celui de Djigdaga et de Garangou ont bénéficié des mêmes faveurs.

« Avec les changements climatiques et les conflits, beaucoup de ménages de cette zone sahélienne ont perdu leur capitale et le projet vient appuyer ces ménages pour pouvoir se relever » explique le coordonnateur technique du programme, Souapebe Gabpobe Aristide

En moins d’un an, les animaux se sont multipliés. Une véritable activité s’est créée autour des petits ruminants. Autrefois oisif et déboussolé, les bénéficiaires ont trouvé de quoi commercer, inscrire les enfants à l’école et subvenir à leurs divers besoins.

Dans le village Adrenga, Khadidja Ali ne tarit pas d’éloge. Cette bénéficiaire qui ne pratiquait aucune activité auparavant se dit aujourd’hui une femme épanouie. « Nous les femmes on ne faisait rien dans ce village mais grâce à ces animaux, nous avons inscrit les enfants à l’école, le matin avant qu’ils n’aillent à l’école, on leur donne le lait de ces mêmes animaux et si je suis coincé je vends 1 ou 2 pour subvenir à mes besoins », se réjouit-elle.

La plupart des bénéficiaires ont mis à profit cet investissement qui résulte du fonds accordé à l’État tchadien et le Fida (Fonds International pour le Développement agricole) en faveur des pays du G5 Sahel et le Sénégal.

Les échanges menés avec les bénéficiaires a permis à la mission de suivi-évaluation du programme SD3C conduite par son coordonnateur technique de s’imprégner des réalités de la population un an après la distribution des petits ruminants. « Les témoignages prouvent à suffisance que c’est une activité qui est en train d’améliorer les conditions de vie pas seulement sur le plan économique mais aussi réconforter les gens moralement. Quand tu vois dans ta cour, des petits ruminants courir comme avant ça donne vraiment l’envie de vivre pour ceux qui ont perdu tout le capital » se réjouit le coordinateur. Mais il promet aussi que les manquements et les doléances de la population seront sérieusement étudiés par le programme dans l’optique d’élargir l’investissement à toutes les couches vulnérables n’ayant pas encore bénéficié.