Après le rejet de la requête des avocats pour “vice de procédure ” il y a deux semaines, le procès des 11 présumés trafiquants de drogue entre dans sa phase décisive. A la prochaine audience du 17 juillet 2020, des témoins clés seront entendus dont le directeur général des services de la Douane et des droits indirects, M. Abdelkerim Charfadine.

Une journée de vendredi pas comme les autres au palais de justice de N’Djari. Un procès peu ordinaire. Une trentaine d’avocats au prétoire, 11 prévus au boxe des accusés, une salle d’audience pleine à craquer, 9 heures d’auditions, le procès des présumés trafiquants de drogue n’a pas fini de révéler ses secrets.

Dès l’entame du procès des joutes oratoires entre le conseil des prévenus et le tribunal sur la nullité de la procédure. Le président du tribunal Hamit Moustapha Nour tranche : c’est une question déjà réglée à la précédente audience. Un des avocats claque à la porte. “Si le droit n’est pas dit je n’ai pas besoin de rester” murmure-t-il en quittant la salle.

Après un petit échange entre les juges, le président du tribunal appelle le premier groupe de Mally Kebir et consorts. Après un débat de fond le dossier est aussitôt renvoyé pour convoquer un témoin. Le second groupe de Idriss Togoï arrive. Son affaire rappelle une autre notamment celle de la drogue saisie au Bénin.

Le prévenu dit ne pas se reconnaître dans cette affaire, mais il a juste acheté une maison qui serait proche du présumé trafiquant actuellement en détention au Bénin. Le prévenu voit son malheur venir d’ailleurs. Il souligne c’est un règlement de compte entre lui et le directeur général sortant de l’ANS, par ce que ce dernier aurait voulu acheter une voiture appartenant au prévenu qui aurait refusé. Il déclare au tribunal : l’ancien dga de l’ANS lui a promis l’enfer. Sinon s’interroge-t-il, comment comprendre qu’il soit arrêté juste trois jours après la nomination du Dga.

Le président du tribunal rétorque que leur affaire personnelle n’a pas de lien avec le cas d’espèce. Le dossier est renvoyé pour écouter un autre témoin.

Arrive alors le troisième groupe de la drogue saisie par les services de la Douane. Huit prévenus se présentent à la barre.

Le tribunal questionne d’abord deux prévenus sur le véhicule qui transporte les marchandises. Les prévenus Souleyman Mahamat et le général Tougout se rejettent la responsabilité. Tougout dit avoir vendu le véhicule à Souleyman qui nie avoir conclu aucun achat avec ce dernier. Dans les discussions, la défense de Tougout brandit une attestation de vente. Souleyman déclare qu’il ne se reconnaît pas dans cette attestation. Le tribunal relève des irrégularités dans l’attestation puis demande à écouter l’un des témoins sur l’attestation.

Le tribunal se tourne vers deux autres prévenus. A ceux-là, on leur reproche d’avoir tenté de soudoyer des responsables de la Douane pour faire sortir les marchandises arrêtées. L’un des prévenus reconnaît avoir reçu une somme de 950 millions Fcfa d’une de ses connaissances pour remettre au directeur général de la Douane. Il a fait recours à Youssouf un proche. Dans le débat, il déclare avoir perdu la mémoire à l’ANS (rire dans la salle).

Ensuite il arrive le tour d’un officier de police qui a tenté de corrompre le procureur de la République s’il aidait à faire sortir ce qui est bloqué par la Douane. Mais le prévenu rejette en bloc ces accusations.

Le président du tribunal se tourne enfin vers un autre prévenu qui a reçu par deux tranche un montant de 260 millions Fcfa, pour affaire dont il est incapable d’expliquer aux juges.

Pendant que les juges poursuivaient leur instruction au fond, le collectif d’avocats du général Tougout introduit une demande de mise en liberté provisoire pour des raisons de santé. Le tribunal a aussitôt rejeté cette demande justifiant le prévenu peut encore tenir bien qu’il soit malade.

Globalement, les 11 présumés trafiquants de drogue ont rejeté en bloc tous les faits à eux reprochés. L’affaire devient ainsi comme à dit un avocat, un feuilleton à plusieurs épisodes.

La prochaine audience est pour le 17 juillet 2020.