Depuis des années, le sud du Tchad est en proie à un phénomène alarmant : l’enlèvement d’enfants à des fins d’exploitation dans le nord du pays. Dans des provinces comme le Moyen-Chari, le Mandoul, le Mayo-Kebbi Est, des familles vivent dans la crainte constante de perdre leurs enfants. Parmi ces victimes, Malik (nom d’emprunt), adolescent de son état, porté disparu il y a quelques semaines, a été déporté vers la zone reculée d’Abkhouta, dans la province du Ouaddaï, à plus d’un millier de kilomètres de son foyer.

Le processus d’enlèvement est souvent orchestré par des réseaux criminels bien organisés, opérant dans l’ombre. Ces réseaux ciblent principalement les enfants issus de familles vulnérables ou vivant dans des régions isolées. “Les motifs de ces enlèvements sont variés : certains enfants sont contraints de travailler comme bergers pour les troupeaux de chameaux, d’autres sont exploités comme travailleurs domestiques ou encore forcés de travailler dans des mines d’or clandestines”, fait savoir Madjiyera Ngar Alkoa, coordonnateur de l’Association pour la Réinsertion des Enfants et la Défense des Droits de l’Homme (ARED), association basée à Koumra, dans le Mandoul.

Parmi les nombreuses victimes de ce fléau, le cas du jeune Malik, enlevé à Bongor, est révélateur. Il se souvient encore du jour où des hommes armés l’ont enlevé, le séparant de sa famille. Malik a été emmené de force vers l’Est, dans la localité d’Abkhouta, certainement, en transite pour le Nord, où il serait vendu à un trafiquant local, selon les témoignages reçus dans la localité.

“A Abkhouta, Malik a été plongé dans un monde d’exploitation et de travail forcé. Il a été contraint de veiller sur des troupeaux de chameaux pendant de longues heures sous un soleil brûlant, sans repos. Les conditions de vie étaient rudimentaires, et Malik était souvent maltraité par ses geôliers, qui attendaient eux aussi, certainement de le revendre pour continuer vers le Nord. Heureusement, qu’il a pu s’échapper”, nous explique une source locale requérant l’anonymat.

Le cas de Malik n’est malheureusement pas unique. Des milliers d’enfants subissent le même sort chaque année au Tchad. Face à cette réalité déchirante, les autorités locales et les organisations internationales doivent redoubler d’efforts pour lutter contre ce fléau. “Des mesures de prévention, de protection des enfants et de poursuite judiciaire des responsables doivent être mises en place de toute urgence pour mettre fin à cette tragédie humaine”, souhaite Madjiyera Ngar Alkoa, qui dit ne jamais baisser les bras, face à l’adversité des trafiquants, souvent, des personnes haut placés. En attendant, des milliers d’enfants comme Malik continuent de vivre dans l’ombre, privés de leur liberté et de leur enfance, victimes d’un système impitoyable d’exploitation et de violence.