OPINION – Le 9 février dernier, le corps sans vie d’un éleveur est retrouvé tout près du village Sandana, dans le canton Koumogo, dans la province du Moyen-Chari. Il a succombé à un accident de circulation sur la voie publique, selon les autorités locales. A la surprise générale, ce qui est un accident va générer un carnage. Des membres de la communauté du défunt attaquent le village, munis d’armes de guerre. Bilan : une douzaine de morts, dont un enfant, et plusieurs blessés.

Cette barbarie n’est pas la première dans ce village. Le 6 août 2019, une attaque des éleveurs y avait déjà fait 12 morts dont 8 dans les rangs des villageois.

Le sang coule à nouveau, danse encore à Sandana. Eperdument et impunément. Dans la province du Moyen-Chari, dans tout le pays, dans la diaspora, sur les réseaux sociaux… Partout, c’est l’indignation, la colère. Pendant ce temps là, au niveau du gouvernement et du Conseil militaire de transition, c’est le black-out total. Silence, on tue ! Pire, le ministère des Affaires étrangères a même l’outrecuidance de sortir un communiqué pour dénoncer « avec force » l’attaque des Houthis yéménites contre l’aéroport d’Abha en Arabie Saoudite. Quel pays ! Quelle honte ! Donc comme ça, les blessés saoudiens valent mille fois mieux que les morts de Sandana. « C’est à en rigoler » de honte, comme aimait à le dire feu Maréchal Déby.

A Sandana, c’est soixante-douze heures après le drame que quatre ministres sont arrivés. Ils sont dans leur registre habituel : toujours en pompiers après l’incendie, en médecins après la mort. Comme à Abéché il y a quelques semaines. Comme partout ailleurs où des Tchadiens se sont entretués.

Le président du CMT, dans un communiqué, a exprimé sa « solidarité » aux familles endeuillées et affirmé que les « criminels de tous bords doivent être poursuivis ». L’heure n’est plus aux discours. Le sang qui danse au son des mitraillettes de la cruauté et de l’impunité n’écoute point la voix même du chef du village. Il faut frapper un grand coup sur le tambour de la Justice pour arrêter cette danse macabre qui a trop duré et fait des milliers de victimes chaque année.

Trop, c’est trop ! Aux grands maux, les grands remèdes ! Aujourd’hui, il ne suffit pas seulement de rendre justice pour Sandana, mais il faut prendre des mesures radicales. Il faut immédiatement démanteler ces ferricks installés autour de ce village et d’autres du sud. Si des individus qui viennent d’ailleurs à la recherche de l’eau et du pâturage, ne peuvent pas accepter de vivre en paix avec les populations qui les accueillent, et se comportent en seigneurs sur des terres conquises, il est temps que ces envahisseurs foutent le camp.

Il faut également désarmer toutes les populations civiles et que les forces de défense et de sécurité assument correctement leurs rôles, au lieu d’être sources d’insécurité. Le directeur général de la Gendarmerie doit arrêter son cirque régulier sur les antennes de la télévision. Soit, le désarmement frappe tout le monde, sans exception, soit chacun s’arrange à acquérir l’arme de son choix pour se protéger. L’on doit veiller à inscrire dans la prochaine Constitution « le droit pour tout Tchadien de posséder une arme et d’assurer sa propre sécurité ».

Le sang versé à Abéché, Sandana, Moïto et partout ailleurs salit chaque jour le bilan du général Mahamat Idriss Déby Itno. Ces tragédies répétées et non résolues effritent considérablement la confiance que beaucoup de Tchadiens ont placée en lui. Le PCMT doit prendre les mesures énergiques proposées ci-dessus et bien d’autres pour arrêter cette danse macabre du sang. Ceci est aussi capital que le dialogue national inclusif. Car ce ne sont pas les morts qui dialoguent. Comment peut-on dialoguer à N’Djaména pendant qu’en province, des compatriotes tuent d’autres comme des chiens ?