Après des jours, voire des mois de captivité, les otages rescapés retrouvent enfin la liberté. Mais que se passe-t-il une fois libérés des mains de leurs ravisseurs ? Quelle vie mènent-ils après leur captivité ? Ces ex-otages dans le Mayo-Kebbi Ouest se confient. Reportage.
Patalet Ouin est un ex-otage, qui vit actuellement dans la ville de Lamé, province du Mayo-Kebbi Ouest, à environ 300 km de la capitale, N’Djaména, et non loin de la frontière avec le Cameroun. Il a passé plusieurs jours en captivité dans les mains des ravisseurs qu’il identifie comme étant des Camerounais. « J’ai été kidnappé aux environs de 21 heures. Les yeux bandés, nous avons marché plus de 24 heures pour rejoindre le campement de mes ravisseurs, situé à plus de 150 km de mon village. Ils ne m’ont pas maltraité, j’étais plutôt bien traité. Mais les conditions de la nourriture ne sont pas réunies. Mes parents ont payé plus de 1 500 000 Fcfa, pour ma libération. J’ai reconnu l’accent de l’un de mes ravisseurs, il doit être un Camerounais, car il parle le foulbé et l’arabe », se souvient, Patalet Ouin.
Les auteurs d’enlèvement ne visent pas que les hommes. Même des femmes sont parfois enlevées. C’est le cas de dame Marie. « J’ai fait une semaine avec mes ravisseurs, avant de retrouver ma liberté. Ils avaient des téléphones et ils étaient toujours en contact avec d’autres personnes en ville. Quand ils ont été informés de l’arrivée des forces de l’ordre et de sécurité, j’ai, aussitôt, été libérée. Certains sont habillés en tenue militaire et d’autres sont en civil. Ils avaient tout à leur disposition, allant des munitions aux nourritures », confie Marie, ex-otage dans la localité Teyanbéra, vers Léré.
Après sa libération, Patalet Ouin a fait de consultations médicales. « J’ai aussitôt repris avec les cours malgré la pression de mon entourage, car je suis indexé là où je passe. Et parfois, je fais des cauchemars. A chaque fois que je vois un militaire, j’ai peur », explique-t-il.
Une peur que ressent aussi dame Marie. « Je me sens en insécurité partout où j’y vais. Il m’a fallu récupérer la forme après trois jours de repos puisque j’ai beaucoup souffert avec mes ravisseurs. Avec eux, des fois, nous marchons près de 30 km parce qu’ils changent souvent leur zone pour ne pas être repérés par les forces de l’ordre et de sécurité. Mes parents n’ont pas de moyens pour une prise en charge psychologique », renchérit Marie.
L’entourage de ces ex-otages affirme que malgré leur libération, ces personnes sont dans un choc émotionnel, oscillant entre la joie intense de retrouver la liberté et les leurs et de l’amertume pour avoir vécu ce calvaire. Ils gardent souvent des souvenirs traumatisants de leur période de captivité. D’autres font des cauchemars, souffrent de troubles anxieux ou de stress post-traumatique.
Dans la province du Mayo-Kebbi Ouest, des ex-otages indexent les éleveurs comme leurs ravisseurs parce que ceux-ci parlent les langues Fulfulde ou Arabe.
Yves Dangourbé avec CFI (projet Afri’Kibaaru)