Il y a quelques jours, nous vous parlions de l’application mobile « Ndenoua » qui sert à enregistrer les naissances et les décès en temps réel. Pour en savoir plus, nous sommes allé à la rencontre du porteur du projet, Sigui Pouidankreo, par ailleurs président directeur-général de Toumaï Hanana.

Tchadinfos : en quoi consiste le projet d’application Ndenoua dont vous êtes le concepteur ?

Sigui Pouidankreo : le projet consiste au développement d’une application qui permettra de moderniser les systèmes d’état civil  par la collecte de données notamment les naissances, décès  et de leur envoi en temps réel aux services de la mairie en charge de l’état civil pour un traitement plus efficace.

D’où vous vient l’inspiration de cette application ?

Née en 2016, ma fille que j’ai nommée Sigui Ndenoua Merveille n’a eu d’acte de naissance qu’en 2018. Soit deux années plus tard, passant par un jugement supplétif, qui n’était non seulement pas simple en terme de démarche puisqu’ un certain nombre de témoins et leurs pièces d’identité étaient requises. Ceci est dû à une négligence de ma part en tant que parent. Je me suis alors interrogé pour savoir combien de parents et d’enfants étaient dans la même situation que moi, quand bien même en étant dans la capitale ? Qu’en est-il des provinces, village et autres ? J’ai compris qu’il y avait un problème à résoudre  en urgence pour inverser la tendance d’où ce projet et j’ai nommé l’application « NDENOUA »

De quel type d’application s’agit-il et pour quel équipement ?

Il sera question d’une application mobile sous Android embarquée dans la tablette Toumaï de 7 pouces  dédiée à cet effet. Ceci, avec une particularité en terme de concentré de batterie d’une  puissance de 8000mah,  soit 80% de ce que représente un ordinateur portable normal et une autonomie qui peut aller jusqu’à 10 jours  selon les fréquences d’utilisation.

Selon vous, l’application servira à résoudre quel type de problème ?

Cette  application a pour but de solutionner les problèmes liés à l’identité des enfants naissant sur le sol tchadien et ainsi d’éviter les apatrides,  à des fins de statistiques pour le gouvernement  et les partenaires pour mieux orienter les prises de décision  en matière d’investissement pour l’éducation et les milieux sanitaires. Disposer d’un acte d’état civil est  un droit fondamental.  Beaucoup de pays africains se trouvent confrontés à cette situation. Le 9 août 2018, un article publié par Tchadinfos nous indique que plus de 80% d’enfants qui naissent ne disposent pas d’acte de naissance. Ce qui témoigne des réalités  dans ce domaine. Au Tchad on peut trouver des personnes de 15 à 20 ans qui n’ont pas d’actes de naissance.  Les parents commencent à courir au moment où il faut inscrire l’enfant à l’école, mais dans le cas d’un décès c’est quand une nécessité administrative l’impose. Pourtant cela doit entrer dans nos habitudes. Les statistiques estiment la population tchadienne à 15 millions, mais on se rend  compte que par la défaillance actuelle du système nous sommes loin du compte.

Quelles sont les conséquences si ces problèmes ne sont pas résolus?

Un enfant sans identité juridique  n’a pas d’avenir puisqu’il est inexistant pour la République. Il est privé de droit de scolarité, de protection sociale et sanitaire ; il est d’avantage exposé au risque du mariage forcé et précoce, du travail précoce, l’immobilisme sans possibilité d’émigrer, une bombe à retardement pour la société. Nous pouvons y remédier  par une volonté politique des dirigeants et une prise de conscience globale. Chacun doit apporter sa pierre pour la construction d’un édifice solide qui apportera une solution fiable et durable pour permettre à tout enfant ou personne le représentant de  justifier de son âge et ainsi de ses droits.

Qui sera impliqué dans le projet au niveau gouvernemental

Diverses correspondances ont été adressées à monsieur le maire de la ville de N’Djamena pour étudier les possibilités d’un pilote à N’Djamena. Nous avons écrit  entre autres au ministre de la santé publique, qui nous a produit la liste des formations sanitaires de N’Djamena ; à celle de l’Action sociale de la Famille, de la Solidarité nationale et de l’Enfance, au ministre de la Sécurité publique, de l’Administration du Territoire et de la Gouvernance locale. La collaboration et l’implication des ministères cités ci-dessus est  incontournable et leurs soutiens sont indispensables à la réussite du projet. Nos correspondances sont en cours de traitement.

Dans la même démarche, nous avons écrit à l’UNICEF  qui nous a encouragé a intégré la dynamique des synergies mises en place par les autorités dans le cadre des objectifs 2018-2022 pour apporter notre expertise au moment venu. Nous avons écrit au HCR avec lequel nous avons eu une réunion avec  le département de la protection de l’enfance ainsi que le point focal représentant du directeur des affaires politiques et de l’Etat civil du ministère de la Sécurité publique. La réunion a été fructueuse et satisfaisante puisque nous étions d’accord sur le fait que la solution proposée pourrait contribuer à rendre efficace en terme d’enrôlement en collaboration avec les parties prenantes.  Nous avons écrit à la fondation Grand Cœur présidée par la première dame pour nous faire l’honneur d’un parrainage ainsi qu’à la représentante d’UNFPA pour un accompagnement, à ce jour  nous attendons leurs réponses.

Quelles sont les personnes  physiques ou morales  qui soutiennent  le projet.

Nous avons eu l’honneur d’échanger avec le célèbre comédien africain Gohou Michel et sa maison de production GOHOU MICHEL PROD qui ont été très sensibles au projet  et  ont promis de soutenir celui-ci  par la sensibilisation   d’autres célébrités, des décideurs et acteurs politiques pour défendre  et promouvoir le projet ainsi que de sensibiliser la population   par une intervention sur différents médias. Compte tenu de son engagement nous lui consentons le titre d’ambassadeur de cœur de ce projet ; sans oublier Monsieur RAZOLO et La compagnie KORAVY qui avaient déjà effectué une campagne de sensibilisation dans ce sens en 2015. Lors d’une audience avec son excellence Kalzeube Payimi Deubet, ministre d’Etat, ministre Secrétaire général de la Présidence en décembre dernier, j’ai eu l’honneur de pouvoir exposer tout mon projet, ainsi que d’autres en cours, et d’avoir suscité en lui le plus grand intérêt.

Quand le projet sera-t-il mis en place ?

Nous souhaitons passer par une phase pilote à N’Djamena dès février prochain pour tester le dispositif afin que son fonctionnement soit compris par les uns et les autres et de laisser les autorités et les  partenaires décider pour la suite.

Comment sera financé ce projet ?

Jusqu’à ce jour, l’étude du projet, la création de l’application, le logiciel et les outils de fonctionnement, la logistique pour rencontrer nos partenaires et toutes les démarches auprès des ministères concernés ainsi que les charges diverses ont été entièrement supportés par TOUMAI HANANA TECHNOLOGIE. Pour aller au bout de ce projet et sa mise en fonction, il est à présent nécessaire que des partenaires interviennent par son financement.