Durement frappée par la chute des cours du pétrole, la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) n’est pas près de se tirer d’affaire en 2016, une année qui s’annonce plus difficile que les précédentes, avec une baisse de recettes encore plus marquée due à une réduction de près de 35% des exportations de brut, selon les prévisions officielles.

En 2016, cet espace communautaire, formé du Cameroun, du Congo-Brazzaville, du Gabon, de la Guinée équatoriale, de la République centrafricaine (RCA) et du Tchad, produira 43,8 millions de tonnes de brut, en baisse de 8,6% comparé à 2015, prédit la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC) dans ses récentes analyses en mars.

A l’exception de la RCA, seul pays non pétrolier de la région, cette production de pétrole brut, son principal atout économique, devrait provenir pour 4,8 millions de tonnes du Cameroun, 11,9 millions du Congo, 11 millions du Gabon, 9,8 millions de la Guinée équatoriale et enfin 6,3 millions du Tchad, d’après ces estimations.

Si ces analyses venaient à se confirmer, ce sera le niveau de production le plus bas de ces dernières années, que la banque centrale régionale justifie par une contraction de l’ordre de 5,1% des investissements dans le secteur, du fait notamment du climat d’incertitudes créé par la baisse des cours du pétrole.

Cette situation ne sera pas sans conséquence pour les exportations qui, estime en outre la BEAC, sont prévues de s’établir pour leur part à un total de 41 millions de tonnes, avec une contribution de 4,4 millions du Cameroun, 11,1 millions du Congo, 10,2 millions du Gabon, 9,8 millions de la Guinée équatoriale et 5,6 millions du Tchad.

En 2015, la zone CEMAC avait enregistré une réduction de 37,6% de ses ventes de pétrole brut, à 9.125,6 milliards de francs CFA (environ 18,251 milliards de dollars), révèlent les chiffres officiels.

Celle-ci avait entraîné une baisse des recettes de 40,3%, à 3.911,6 milliards de francs CFA (7,823 milliards de dollars), concernant l’ensemble du secteur pétrolier, également marqué par une diminution de 44,4% des ventes de méthanol et autres gaz.

Pourtant, la production pétrolière avait progressé de 4,2% à 47,9 millions de tonnes et avait permis d’atténuer la baisse de 8,6% à 8,1 millions de tonnes déclarée pour le méthanol et autres gaz et faire croître de 1,3% l’ensemble du secteur pétrolier.

Après 49.187,2 milliards (98,374 milliards de dollars) en 2014 et 47.900,7 milliards (95,801 milliards de dollars) en 2013, le bloc de six pays avait clôturé l’année avec une cagnotte de 43.980 milliards de francs CFA (87,960 milliards de dollars) de valeur du produit intérieur brut (PIB).

Pour une croissance estimée à 2,8%, l’apport du secteur pétrolier est rapporté à 0,3%, un niveau plus ou moins acceptable que celui de 0,8% en 2014, précédé des taux négatifs de -2,2% en 2013, -0,4% en 2012 et -0,6% en 2011.

Pour 2016, la zone CEMAC table sur un repli à 1,6% de croissance du PIB, une détérioration des indicateurs économiques justifiée en partie par la persistance de la crise du marché du pétrole, qui devrait se traduire par une contraction de 29,2% à 2.771,1 milliards de francs CFA (5,542 milliards de dollars) des ressources d’origine pétrolière (pétrole, méthanol et autres gaz compris), selon les prévisions de la BEAC.

“La poursuite de la baisse des cours du pétrole brut sur les marchés internationaux devrait détériorer davantage les capacités financières des Etats de la CEMAC. La gestion des finances publiques en 2016 devrait ainsi se solder par un creusement du déficit budgétaire, base engagements, hors dons, qui asserait de 4,1% du PIB en 2015 à 7,1% du PIB en 2016”, souligne un rapport de la banque centrale.

“Comme en 2015, poursuit le document, tous les pays de la CEMAC enregistreraient un solde budgétaire, base engagements, hors dons, déficitaire et en aggravation”, indique le rapport.

Le déficit le plus élevé est annoncé en Guinée équatoriale : à -18,8% du PIB, l’eldorado pétrolier d’Afrique centrale devrait par la même occasion continuer de plonger dans la récession, par une contraction de 11,3% de croissance, après -6,2% en 2015.

Dans ce classement, le Congo-Brazzaville arrive en deuxième position, avec un déficit de 17,8% du PIB et un taux de croissance cependant en rebond de 4,5%, contre 2,4% en 2015. Il est suivi de la RCA, qui devrait enregistrer un déficit budgétaire de 12,5%, pour une croissance de 5,9%, la plus forte de la région.

Au Cameroun, où la croissance devrait décroître à 5,2% après s’être maintenue à 5,9% en 2015 et 2014 depuis le rebond de 5,6% en 2013, la dégradation du solde budgétaire serait de 4,6% du PIB.

En légère baisse d’activité à -0,3%, le Tchad devrait de son côté observer un déficit de 4,2% du PIB. Le Gabon, lui, devrait réaliser le plus faible déficit, de l’ordre de -2,6% du PIB, et une croissance de 3,6%, contre 4% en 2015.

Contrairement aux mauvais résultats du secteur pétrolier, l’activité dans la zone CEMAC devrait être portée encore une fois, comme en 2015, par les autres segments de l’économie, pour lesquels la BEAC projette une progression de 18,1% à 6.305,8 milliards de francs CFA (12,611 milliards de dollars) de recettes.

Selon la banque centrale, la contraction des exportations due à “une réduction des ventes de pétrole brut (-34,7% à 5.955,6 milliards), de méthanol et autres gaz (-25,4% à 1.231,7 milliards)”, devrait en effet être « atténuée par l’augmentation des ventes de bois (+13,5% à 947,0 milliards), de manganèse (+60,4% à 549,1 milliards) et de cacao (+15,7% à 392,0 milliards)”.

“En définitive, conclut-elle alors, le déficit global de la balance des paiements reviendrait à -3.005,3 milliards en 2015 à -2.219,2 milliards en 2016. Il serait couvert par une ponction sur les réserves officielles à hauteur de 1.471,6 milliards, et par un financement exceptionnel net de 28,1 milliards, au titre d’allègement de la dette au Tchad”, ajoute la banque centrale.

Pour ses besoins de financement, la région aurait dans cette perspective affaire à un gap de 719,6 milliards de francs CFA (1,439 milliard de dollars) à combler. En 2015, elle affichait un taux de 26% d’encours de la dette extérieure rapporté au PIB. Pour 2016, une augmentation à 30,1% de ce taux est annoncée.
Xinhua