Les 42 membres du dernier gouvernement ne sont pas tous des « commis de l’état ». Certains d’entre eux ont assuré de hautes fonctions dans le secteur privé ou au sein des organisations internationales avant de poser aujourd’hui leurs pénates dans les cabinets ministériels. Une mixité de profils qui marque une réelle volonté d’ouverture. Et de travail ?

Les imbridadnadjications entre les secteurs public et privé n’ont jamais été le propre de la vie administrative tchadienne en dehors de la passation des marchés. Rares sont les transfuges de l’un à l’autre. Mais avec l’arrivée de certaines personnalités étrangères aux arcanes de la fonction publique dans le gouvernement dirigé par Djimrangar Dadnadji Joseph publié le 26 janvier denier, cette frontière fictive entre deux mondes  a été franchie (même si des précédents existent certainement dans notre pays). « La manière de diriger un cabinet ministériel est totalement différente d’un management pur d’entreprise. Différenet dans l’approche, différente dans la manière d’atteindre les objectifs et surtout dans les rapports avec les collaborateurs. La transition entre les deux peut être comparée à un travail d’orfèvre » concède Mathieu Bekan, un ancien collaborateur du ministre congolais chargé des Ressources forestières.

Cette « mixité des profils » est personnifiée par quatre nouveaux ministres : Amir Adoudou Artine, ministre du Développement pastoral et des Ressources animales. Homme d’affaires confirmé à la tête de GEYSER SA qui réalise plus de 10 milliards de chiffres d’affaire annuel. Ndjerassem Le Bémadjiel, ministre de l’Energie et du Pétrole. Ingénieur foreur employé par la société française Schlumberger et lauréat du Grand prix d’inventions de Genève (Suisse) en 2011. Bédoumra Kordjé, ministre du Plan, de l’Economie et de la Coopération internationale. Un ancien vice-président de la Banque africaine de développement. Il est aujourd’hui retraité. Martin Bagrim Kibassim, ministre du Microcrédit pour la promotion de la femme et de la jeunesse. Il a accompli l’ensemble de sa carrière au Programme alimentaire mondial.

Powel, Raffarin ou Okonjo-Iweala

Les femmes et hommes ayant réussi ailleurs qu’au service de l’état avant d’accéder à de grandes fonctions ministérielles sont nombreux sous d’autres cieux. Colline Powel, commandant en chef charismatique des forces armées américaines lors de la première guerre du Golfe, est devenu secrétaire d’Etat à la Défense (ndlr : équivalent du ministre de le Défense) sous la présidence de Georges W. Bush. En France, Jean Pierre Raffarin a été un publicitaire de renom avant de diriger l’un des gouvernements de la présidence de Jacques Chirac. Plus proche de nous, on peut citer Madame Ngozi Okonjo-Iweala, méritante Directrice générale de la Banque mondiale avant d’enfiler avec succès le costume de ministre des Finances dans un pays aux contours aussi complexes que le Nigéria. Les qualités principales des ces personnes sont leur dualité et leur capacité à s’adapter à des environnements totalement différents. Tels des caméléons, ils ont, dans le cas de Collin Powel, éviter les balles sur les champs de batailles. Jean Pierre Raffarin a du s’imposer dans la publicité et le marketing, un secteur d’activités ou la concurrence est exacerbée. Ngozi Okonjo-Iweala, quant à elle, a essuyé les écueils d’une administration (celle de la BM) conservatrice et ne laissant, à son époque, que très peu de latitude aux ressortissants du sud.

Chez nous, «cette ouverture vers le secteur privé marque une réelle volonté de travailler en phase avec le discours de fin d’année 2012 du chef de l’Etat. On fait appel à toutes les compétences, à tous les dynamismes. C’est une bonne chose » souligne Madjiasra Nako, correspondant de RFI au Tchad et observateur avisé de la politique.

Ce dosage (savant ?) entre fonctionnaires aguerris, personnages clés du secteur privé et retraités des institutions internationales est-il un gage de résultats tangibles à court terme pour ce nouvel attelage gouvernemental?

 

Source : Le monde vu du Tchad