OPINION – Jean-Bernard Padaré séjourne en France où il a accordé mercredi et jeudi des interviews à TV5 et RFI. Le secrétaire national du MPS s’est exprimé sur la vie chère, les délestages, les coupures des réseaux sociaux et la corruption. Sans convaincre.

Sur le plateau de journal Afrique de TV5, le mercredi 22 mai, et, le lendemain, au micro de RFI, les réponses de l’avocat, cadre du Mouvement patriotique du salut (MPS), ont rendu furieux plus d’un Tchadien. Me Jean-Bernard Padaré a raté une grosse occasion de convaincre.

Que ce soit à TV5 ou à RFI, le secrétaire national chargé de la mobilisation du MPS, parti au pouvoir, a donné l’impression de parler aux Français et non aux Tchadiens qui vivent sous 45°c. Comment pouvait-il se permettre de parler de la cherté de la vie comme s’il la vivait ? Et il a même soutenu que le bilan de l’opération “Juste prix” était positif. Faut-il lui rappeler que la cherté de la vie ne s’arrête pas après le ramadan ? Que cette situation frappe tous les jours des pauvres Tchadiens ? Lui n’en fait sûrement pas parti.

Me Pandaré, qui a abordé la question des coupures intempestives de l’électricité que connaissent les Tchadiens, alimente sa villa avec un groupe électrogène. Au Tchad, le problème de délestage est réel : des quartiers de N’Djamena sont plongés dans le noir dès 18 heures, des lampadaires des voies publiques ne s’allument plus. Il faut ajouter à cela le problème de l’accès à l’eau : à Abéché, la capitale de l’Est, par exemple, il n’y a plus d’eau à boire. Pourquoi ? La Société nationale de l’eau n’arrive plus à approvisionner tous les habitants.

Padaré contredit Déby

Me Jean-Bernard Padaré ne s’est pas arrêté là. L’ancien ministre est allé jusqu’à contredire le président Idriss Déby Itno sur la question de la corruption. Alors que le chef de l’État avait reconnu que “des personnalités ont profité de la manne pétrolière”, Jean-Bernard Padaré, lui, a déclaré qu’au Tchad, “la corruption relève d’un mythe”. Un mythe ? Alors qu’à N’Djamena, des fonctionnaires qui gagnent par exemple 250 000 francs CFA se construisent des villa en une année… D’où provient cet argent ? De la corruption.

Ce n’est pas pour rien que, le 1e décembre 2016, lors de la commémoration de son accession au pouvoir, le président Déby avait reconnu que “tout le système de l’Administration tchadienne est corrompue”. Par la même occasion, le chef de l’État avait d’ailleurs supplié les fonctionnaires de “cesser avec la corruption”. Alors, M. Padaré, au regard de ces faits, la corruption reste-t-elle toujours “un mythe” ?

Coupure des réseaux sociaux ou prétexte sécuritaire

Sur la restriction des réseaux sociaux depuis plus d’une année au Tchad, Me Padaré a également semblé parler d’un sujet qu’il ne maîtrise pas. Pour lui, “les réseaux sociaux sont coupés pour des raisons de sécurité”. Même si des Tchadiens savent déjà comment contourner ce blocage, il a oublié de dire que cette censure profite surtout aux opérateurs de téléphonie qui reversent d’énormes taxes au gouvernement.

Pour appuyer son argumentaire, M. Padaré a ajouté que “les terroristes peuvent profiter des réseaux sociaux pour faire une attaque”. N’est-ce pas là un prétexte pour justifier le profit énorme que l’État fait sur le dos des consommateurs ? En tout cas, ces restrictions limitent les espaces d’expression libre au Tchad, alors que la liberté d’expression est un droit fondamental. Reste plus qu’à espérer, comme la plupart des Tchadiens, que M. Padaré redescende sur terre et arrête sa propagande.