PORTRAIT – Animée par la passion de travailler à la morgue depuis les bancs de l’école, elle est à nos jour la seule femme au Tchad ayant le courage d’officier dans ce service dans un hôpital. Elle se nomme Memti Nicole. Mais qui est vraiment cette dame qui communie avec les cadavres ? 

« 95% de la population tchadienne pensent que quand c’est déjà un corps sans vie, il faut le jeter et ne plus y toucher. Pourtant c’est une  personne comme toi. » Tel est le constat qui a motivé Memti Nicole à s’engager dans le service de la morgue. A la base, Memti Nicole est agente de santé travaillant dans différents services à savoir: pédiatrie, maternité, chirurgie, etc. Après un temps d’expérience, elle choisit de travailler au service de la morgue.

Née à Moundou dans le Logone occidental en 1986, Memti Nicole fait ses premières classes dans différentes localités du pays comme Moundou, Moïssala, etc. Elle fréquente le collège à N’Djamena, Moundou, Ba-Illi. Elle obtient son Brevet d’étude du premier cycle en 2004 au collège d’enseignement général n°2 de N’Djamena et son baccalauréat en 2008 au lycée San frontières de N’Guéli dans le 9e arrondissement.

Passionnée des soins de santé, elle décide d’en faire carrière en suivant des cours relatifs à ce sujet dont elle en sort nantie du diplôme  d’infirmier diplômé d’Etat (IDE).

Début de la carrière

« Tout commence à l’hôpital régional de Sarh où j’étais en stage. Il y avait un accident qui a fait une dizaine de morts. Le gardien de la morgue étant souffrant, le personnel ayant peur de s’occuper des corps, j’ai pris  mon courage de laver les corps et je les ai habillés. Ayant terminé, en sortant, je ne devrais pas me retourner mais j’ai fait le contraire. Un des corps a ouvert les yeux et a secoué la tête. Ce geste fut interprété par le chef du service comme une bénédiction », raconte la dame. Elle ajoute que, « cela fut une motivation pour s’engager dans le service des urgences. »

Mariée et mère de deux filles, la dame relate comment elle s’est prise pour arriver à ce service. « Même quand j’étais à la chirurgie, je quittais chaque nuit pour venir assister le service de la morgue et voir comment les agents s’y prenaient. Après cela, j’ai suivi une formation dans ce domaine avec Dr Guernabaye Djasnabaye qui m’a montré pratiquement comment prendre soin des corps. C’est ainsi que j’ai demandé de rejoindre ce service. ».

Travaillant à ce service depuis plus de 8 ans, cette chrétienne catholique explique son rituel : « lorsque que je reçois un corps sans vie, je me mets dans ma tenue de travail, accompagnée de masques, gants, babouche avant de poser le corps sur la table afin de le laver ». Selon elle, « la prière demeure une arme efficace ». Avant de poursuivre que, « nos parents (les cadavres) ont besoin qu’on prenne soin d’eux aussi et qu’il faut leur rendre ce service avec un seul cœur ».

Fière de son travail, cette trentenaire poursuit son grand rêve qui est celui d’aller à l’extérieur suivre des formations approfondies dans cette discipline et mettre sur pied le service d’autopsie.

« Dans la vie, lorsque vous choisissez de faire un métier quelques soient les inconvénients, il faut persévérer pour y arrive  », conseille-t-elle.

Djimhodoum Serge