Au Tchad, le chômage frappe toutes les catégories d’individus, diplômés ou pas. Pour survivre, il faut s’armer de courage pour se prendre en charge. Tchadinfos vous propose le portrait de l’un de ces hommes qui se battent au quotidien loin des bureaux et des salaires garantis.

Assis à même le sol ou debout, mines tristes pour certains, ces travailleurs pour la plupart pères de familles, installés aux alentours de la grande mosquée de N’Djamena, proposent chaque matin, poignet levé, leur savoir-faire aux publics. Ils sont des maçons, des électriciens, des plombiers, bref des hommes de terrain avec leurs matériels rangés dans des sacs, prêts à l’emploi. Déjà, de loin, nous apercevons l’un deux se précipiter vers un motocycliste pour le convaincre de l’amener sur son chantier. Ce qui fut fait. Les autres attendent impatiemment leur tour.

Parmi ces bras valides, se trouve, un quinquagénaire, MBAIRESSEM Jean. L’homme est plutôt d’un abord facile. Avouons-le. Au vu de son âge et connaissant l’espérance de vie au pays de Toumaï, sa témérité ne semble souffrir d’aucun doute. « Je suis à la fois maçon et menuisier », confie MBAIRESSEM Jean, sourire aux lèvres. Avant de poursuivre. « Nous sommes venus ici pour chercher le travail parce qu’on a rien d’autres à faire. Quand les gens nous regardent, ils pensent que nous sommes des bandits mais ce n’est pas vrai. Ici, il y a un peu de tout. Vous pouvez trouver des maçons, des électriciens, des plombiers, bref de main d’œuvre pour tout travail ».

Le natif de Mbaïtomon, dans le Logone occidental, a déposé, très tôt, les cahiers pour prendre sa vie en main. C’est une question de survie, dit-il, d’un air triste. Il y’avait des difficultés financières au niveau de la famille, raconte MBAIRESSEM, c’est pourquoi, justifie-t-il, j’ai arrêté les cours en quatrième. Dès lors, Jean à multiplier des petits boulots. Il a eu à travailler dans des entreprises telles que Sacogen et Satom. Malgré ces vingt ans d’expérience, le père de famille n’a toujours pas de repère. « Maintenant, il n’y a pas de travail. Ça fait vingt ans que je suis dans divers métiers, mais, la situation ne change toujours pas », se lamente-t-il.

MBAIRESSEM Jean est marié et père de cinq enfants. « Ma fille ainée à vingt ans et elle a trois enfants ; et la benjamine à cinq ans. Je suis grand-père ! », se réjouit-il. Face à cette vie de famille plutôt paisible, se dresse la dure réalité, celle de tous les jours. « J’habite le quartier Digo. Aujourd’hui par exemple, puisqu’il a plu, je suis arrivé à l’aide d’une pirogue, moyennant 50 Fcfa. Cela m’a un peu retardé. Sinon, auparavant, à 7 heures déjà, je suis ici. Habituellement, je quitte la maison à 5 heures. Maintenant, c’est une question de chance. Quand on ne trouve rien, nous sommes obligés de rentrer à pied. Je nourris ma famille avec ce que je fais. Ma femme fait du commerce. Elle vendait des fagots mais avec les contrôles qui se renforcent, elle se débrouillent avec d’autres petites marchandises », explique le quinquagénaire tout en hochant la tête.

Et comme si cela ne suffit pas, l’homme rencontre une catégorie de gens malhonnêtes, à la limite cruels, dénoués d’humanisme. Certains, dénonce MBAIRESSEM, malgré que tu leur fais un bon travail, ils ne veulent pas payer. Face à eux, dit-il impuissant, on ne peut rien, puisque, nous sommes pauvres et eux, ils ont des moyens.

Au prix de ses efforts inlassables, l’homme possède sa propre concession au sein de laquelle il a construit deux chambres. Pour l’avenir, le natif de Mbaïtomon, ne croit pas à un miracle. « Je n’ai pas de projets mon frère, on vit au jour le jour », lance-t-il désespérément.

NDALET POHOL-GAMO