Les avocats de Gody Tary Gassara, Mouné Koudanbé et Olivier Gouara ont fait un point de presse le mercredi 20 octobre pour situer l’opinion sur l’affaire qui oppose leur client à World Vision et son agent Rimhoudal Dono pour faux et usage de faux et escroquerie.

Me Mouné Koudanbé rappelle que leur client, Gody Tary Gassara est un opérateur économique. Un autre opérateur économique s’est rapproché de lui pour lui présenter un marché qu’il avait gagné auprès de World Vision mais qu’il avait un problème de financement.

« Notre client, avant de procéder à la signature du protocole d’accord qui consistait à financer l’intégralité du marché qui montait à plus de 900 millions, s’est rapproché de World Vision pour s’assurer de l’existence réelle, de l’authenticité de ce marché. Il avait été reçu par M. Rimhoudal Dono comme coordinateur nationale de World Vision qui lui avait confirmé l’existence réelle, l’authenticité de ce marché et des marchés qui étaient déjà en cours. Mettant en confiance notre client qui avait financé à plus de 900 millions ce marché », explique l’avocat.

Mais, poursuit-il, par la suite, c’est quand Gody Tary Gassara avait commencé par faire des réclamations, qu’il se rendra compte qu’en réalité que tous les contrats fournis n’étaient pas dans leur totalité de vrais contrats, qu’il y avait de faux contrats. Et que sur ces contrats, il y a  l’entête et le sceau de World Vision, et la signature d’un ancien directeur national de World Vision.

C’est pourquoi, détaillent les avocats, les paiements n’ont pas pu effectivement avoir lieu et leur client a porté plainte.

C’est ainsi que, selon Me Mouné, après l’ouverture d’une information judiciaire, le Cabinet d’instruction en charge du dossier, « après avoir suffisamment instruit l’affaire, a rendu son ordonnance en retenant l’ONG World Vision et Rimhoudal Dono dans les liens de la prévention, pour les infractions de faux et usage de faux et d’escroquerie, tout en renvoyant l’affaire devant le tribunal correctionnel ».

Une longue procédure

L’ONG World Vision a relevé appel. Mais, la chambre d’accusation, par devant laquelle ladite ordonnance avait été déférée, a déclaré l’appel de l’ONG World Vision irrecevable et avait renvoyé l’affaire devant le tribunal statuant en matière correctionnelle.

Ainsi, le 4 juin 2021, le Tribunal de Grande Instance de N’Djaména, siégeant en audience correctionnelle et de simple police, a par jugement correctionnel répertoire n° 160/2021, condamné solidairement l’ONG World Vision et son agent Rimhoudal Dono à payer une amende ferme de dix millions (10 000 000) FCFA, et à Gody Tary Gassara, la somme de 978 809 375 FCFA à titre principal et par provision, nonobstant toutes voies de recours et de 150 000 000 FCFA à titre de dommages-intérêts pour tous préjudices subis.

Les prévenus ont encore relevé appel. « Cependant, au regard de son caractère provisionnel, il demeurait exécutoire en son principal et ce, nonobstant le recours initié par l’ONG World Vision et son agent Rimhoudal Dono. En dépit de ce fait, et contre toute attente, le Ministre de la Justice, à travers l’Inspection Générale de son ministère, s’est donné la liberté de s’immiscer dans cette affaire, en ordonnant au Procureur Général près la Cour d’appel de N’Djaména de mettre tout en œuvre pour suspendre l’exécution du jugement correctionnel répertoire n° 160/2021. C’est pourquoi, ce dernier a saisi tour à tour les différents huissiers de justice, qui avaient pratiqué des saisies sur le compte bancaire de l’ONG World Vision, aux fins de procéder à la mainlevée desdites saisies », déclare Me Mouné Koudanbé.

Toutefois, poursuit-il, malgré « l’immixtion flagrante » du ministre de la Justice dans le cadre de cette affaire, la Cour d’appel de N’Djaména, a confirmé, par arrêt répertoire n° 039/2021 du 5 octobre 2021, le jugement correctionnel répertoire n° 160/2021 rendu par le Tribunal de Grande Instance de N’Djaména, en son principe de condamnation pécuniaire.

Les Conseils de l’ONG World Vision, ont introduit, cette fois, par devant le Président de la Cour Suprême, une requête aux fins de sursis à exécution de l’arrêt correctionnel. « Mais conscient du principe cardinal de séparation des pouvoirs et de l’indépendance de la Justice, le Président de la Haute juridiction, à savoir la Cour Suprême, a, à ce jour, 20 octobre 2021, déclaré irrecevable la requête de l’ONG World Vision », se réjouit Me Mouné Koudanbé qui salue, au passage le « courage de nos magistrats tout en consacrant encore une fois de plus le principe de l’indépendance de la Justice ».