A chaque saison des pluies, les voies qui mènent aux cimetières de Lamadji dans le 10e arrondissement et de Toukra dans le 9e arrondissement deviennent impraticables. Obligés, les usagers transportent les corps sur leurs épaules pour accéder aux lieux d’enterrement.

« On connaît la valeur du sel quand il n’y en a plus, et celle d’un père après sa mort », dit un proverbe indien. Au pays de Toumaï, les morts ont-ils de la valeur ? Difficile de répondre!

A 100 mètres après le sous poste de la douane de Walia, le cortège ralentit. Sous un air triste les hommes se dirigent vers la forêt les uns après les autres. A la descente du goudron, les femmes s’agrippent aux hommes qui, à leur tour tiennent durement les véhicules. Ils dandinent du fait de la dégradation de la route. « Tiens son habit, sinon tu risques de tomber », ordonne une femme à sa fille. Les motocyclistes, eux s’arrêtent et retroussent leurs pantalons avant de se relancer dans cette voie difficile. Le véhicule transportant le corps se gare à la descente du goudron. Difficile d’amener le corps jusqu’à la destination. « La route est impraticable, il faut descendre et transporter le corps », s’exclame le chauffeur. Obligés, les bras valides se constituent en groupe et portent le corps sur leurs épaules jusqu’au lieu d’enterrement.

La voie principale qui mène vers le cimetière de Toukra, dans le 9e arrondissement est envahie par l’eau. « Les deux grosses pluies qui se sont abattues ces derniers jours sur la ville de N’Djamena, l’ont engloutie », explique Roger, un habitant dudit quartier rencontré sur les lieux. Une partie de la route a été creusée par des inconnus empêchant ainsi les usagers de passer. Ne pouvant rien faire, ils passent par la forêt de Walia pour accéder au cimetière.

« L’Etat a-t-il oublié les morts ? », s’interroge un homme issu du cortège, avant de s’indigner que même de simples rues qui mènent au cimetière, l’Etat est incapable d’aménager. On est contraint de passer par les sentiers de la “forêt” pour enterrer nos morts déplore-t-il.

Pour le représentant de la communauté Gouley, Alladoumngar Tedengarte, présent sur les lieux, cette voie est facile à aménager. Les résidus des goudrons enlevés ailleurs, l’Etat aurait pu mettre sur cette voie et canaliser pour la rendre accessible, souligne-t-il. « C’est vraiment pénible quand on perd un membre de la famille, et il faut encore l’enterrer péniblement », a-t-il déploré.

Hormis le cimetière de Toukra, l’accès au cimetière de Lamadji est lui un calvaire pour les usagers. La boue, des eaux de pluie stagnées sont à constater çà et là. Les piétons et les motocyclistes glissent, les véhicules s’embourbent. la peine et la résignation se lisent sur les visages déjà affligés par la perte d’un être cher.

Pour les autorités municipales, un projet portant bitumage des routes des cimetières est en cours de finalisation. « Il sera exécuté bientôt pour mettre fin aux souffrances de la population qui vient enterrer des proches en saisons de pluie » évoque l’administrateur de la commune du 10e arrondissement, Maxime.