L’économie du Tchad perd chaque année près de 575,8 milliards F CFA (environ un milliard d dollars), soit 9,5% du PIB, des suites de la malnutrition, indique un rapport sur le coût de la faim au Tchad réalisé sous le leadership du ministère tchadien du Plan et de la Coopération Internationale avec l’appui du Programme Alimentaire Mondial (PAM).

Selon ce rapport basé sur une étude menée depuis décembre 2014 et publié cette semaine, seul un enfant sur trois souffrant de sous-nutrition a reçu une attention médicale adéquate; 43% des cas de mortalité infantile au Tchad sont associées à la sous-nutrition; la mortalité infantile associée à la sous-nutrition a réduit de 13 % la population active du Tchad; 56% de la population adulte au Tchad a souffert de retard de croissance durant l’enfance.

Plus de 3,4 millions d’individus en âge de travailler sont empêchés d’atteindre leur plein potentiel.

L’impact socio-économique de la malnutrition infantile sur le développement à long terme du Tchad illustre le manque à gagner dû au fléau: hausse des frais de santé, pressions sur le système éducatif, faible productivité de la main d’œuvre, etc. Ce qui occasionne une diminution de 63,7 milliards F CFA de la productivité économique.

L’augmentation des frais de santé liés à la malnutrition infantile est estimée à 168,5 milliards F CFA, indique le rapport.

Selon un autre rapport de l’UNICEF intitulé “”Dès la première heure de vie”, les pratiques nutritionnelles inadaptées, notamment l’introduction tardive des aliments solides, les repas peu fréquents et le manque de diversité alimentaire, sont monnaie courante, et privent les enfants de nutriments essentiels à un âge où leur cerveau, leurs os et leur organisme en développement en ont le plus besoin.

La moitié des enfants âgés de six mois à deux ans ne prennent pas le nombre minimum de repas recommandé pour leur âge, ce qui accroît le risque de retard de croissance. Le coût élevé des aliments d’origine animale ne permet pas aux familles les plus pauvres d’améliorer l’alimentation de leurs enfants, etc.

Pour le PAM, si le Tchad veut assurer une croissance humaine et économique inclusive, une attention particulière doit être accordée aux premières étapes de la vie.

Sans mesures appropriées pour combattre et éliminer la sous-nutrition, le coût pour le Tchad pourrait encore augmenter, prévient-on.

Les experts suggèrent au Tchad de prendre les dispositions nécessaires pour inscrire la nutrition dans les documents de politique et des stratégies nationales de développement, notamment dans la vision 2030 et le plan quinquennal 2016-2020 de développement.

Ils recommandent au pays d’élaborer et de mettre en œuvre une politique intégrée de lutte contre la sous-nutrition impliquant l’ensemble des secteurs concernés, avec des objectifs quantifiables, pour diminuer l’incidence de la sous-nutrition.

“Les résultats de cette étude permettront désormais à l’ensemble des parties prenantes de la nutrition au Tchad de prendre les mesures adéquates sous formes de programmes et projets pour enrayer la faim et la malnutrition”, a déclaré Mme Mariam Mahamat Nour, ministre tchadienne de l’Economie et de la Planification du Développement.

“L’objectif d’une élimination du retard de croissance et, plus largement, de l’élimination de la faim, ne sera atteint que grâce à un effort soutenu et coordonné”, a prévenu Thomas Yanga, directeur du Bureau Afrique et représentant du PAM auprès de l’Union africaine (UA).

Il espère qu’en dévoilant les coûts économiques de la faim au Tchad, cette étude puisse constituer un appel à l’action pour toutes les parties prenantes.

L’initiative panafricaine “Le coût de la faim en Afrique” est menée par la Commission de l’UA, l’Agence de planification et de coordination du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), en partenariat avec les gouvernements africains et avec le soutien de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique et le PAM.

Le Tchad est le 9ème pays du continent à prendre part à cette initiative, après le Burkina Faso, le Ghana, l’Egypte, le Malawi, l’Ouganda, le Rwanda et le Swaziland.

L’étude est également en cours au Lesotho, à Madagascar, au Mali, en Mauritanie, au Mozambique, en République démocratique du Congo (RDC) et au Zimbabwe.

Les études réalisées à ce jour ont révélé des manques à gagner pour le PIB allant de 1,9 à 16%, suivant les pays.