Les sacs en plastique sont en théorie interdits depuis des années à N’Djamena. Néanmoins, ils continuent d’être distribués et vendus dans les marchés et commerces de la capitale au grand dam des autorités et autres protecteurs de l’environnement.

Communément appelés “Léda”, les emballages en plastiques sont le triste symbole de l’époque de la protection de la nature, notamment du “tout-jetable”. Quelques années après leur “interdiction formelle” comme le dispose l’arrêté municipal de l’ex Maire, Marie-Thérèse Mbaïlemdana en 2010 car, “la ville de N’Djamena, vitrine de l’Afrique, devait faire sa toilette à l’occasion du cinquantenaire de l’indépendance”, les Léda n’ont pas disparu. On les voit toujours à certaines tables de vente, étals de fruits et légumes et dans de nombreux commerces de proximité. Les Léda ont définitivement la vie dure.

Cette “utopique” disparition est dénoncée par de nombreuses associations de défense et de protection de l’environnement. Ces associations concèdent qu’en dépit de faibles données statistiques, “les mesures prises ont constitué une avancée significative dans le sens où elles ont contribué à changer peu à peu les habitudes et conduites des consommateurs en les incitant à utiliser davantage d’autres types de sacs et paniers à savoir sacs papiers, sacs en fibres synthétiques ou en fibres naturelles recyclables’”. Le texte, instruit dans la visée de lutte contre la pollution et pour la salubrité de la capitale, n’est pas allé loin malgré un démarrage louable, selon une source.

“Les vendeuses de savons, ou de crudités m’en donnent encore (…)”, affirme Orpah, 57 ans, croisée au sortir du Marché communal de Chagoua. “Les seuls qui donnent encore du papier ou enveloppe sont les boutiquiers au quartier. D’ailleurs l’encre colorant leurs vieux papiers journaux dépeint sur les denrées et se déchirent facilement. Personne n’en veut”, lâche Kézias, ménagère habitant Walia. Pour Nassour, boutiquier au quartier Bololo, le retour des Léda est justifié. Ils sont moins chers comparés aux solutions d’échange. Un carton de papiers ou feuilles de journaux vaut 10.000 Francs; le prix d’un paquet d’enveloppes kaki selon les qualités oscille entre 500 et 750 Francs; tandis qu’une pile de Léda ne dépasse pas les 250 Francs. Le choix est alors clairement indiqué.

La disparition complète des Léda gratuits? Sûrement pas. C’est vrai qu’au début, j’ai eu du mal à m’adapter au papier. Le Léda est quand même super pratique”, avoue une cliente d’un supermarché huppé du centre ville. Tellement habituée aux Léda, elle oublie systématiquement les paniers “je reviens ou djackay”  (autre appellation du léda) chez elle, car elle trouve toujours des Léda lorsqu’elle sort faire ses courses. Même les grands magasins d’alimentation ou boutiques chics jouent le jeu. Ils distribuent des Léda après achat d’articles. Sauf que leurs Léda sont “griffés et plus jolis”, ironise-t-elle. Enfin, la dame épilogue laconiquement: “regardez autour de vous, la plupart des gens qui sortent d’ici ont leurs vêtements et chaussures dans des sacs plastiques, non ?”. Oui évidemment pouvait-on constater.

Un gérant de vente d’alcool reconnaît que les Léda sont bien interdits. Mais depuis peu, il ne se fait plus inquiéter par les “corps habillés” à son retour de Kousseri, ville camerounaise frontalière, avec des paquets de Léda chaque semaine.

A N’Djaména, les gens ne dissimulent plus les Léda. Au contraire, les Léda circulent allègrement de mains en mains. Les utilisateurs s’accordent unanimement que les Léda font leur retour dans la capitale.

Bactar Frank I.