Nous vous proposons en exclusivité un extrait de l’interview du président tchadien Idriss Deby Itno accordé à notre partenaire l’hebdomadaire Notre Temps #523. Au menu : la crise économique et sociale, la menace terroriste, la révision de l’accord politique du   13 août 2007, la lutte contre la corruption, etc.

A la fin de l’année 2012, le pays a été paralysé par une longue grève. Le front social risque de s’embraser d’ici la fin du mois. Qu’est-ce que vous proposez comme solutions aux revendications des travailleurs?

Je voudrais me félicité de ce que les journaux de la place fassent aujourd’hui des efforts pour aller chercher la vérité là où ils devaient le faire mais pas aller ramasser dans la rue ce que vous pouvez penser. La présidence est ouverte à tous les journalistes de la presse écrite privée comme publique et la presse non écrite aussi. Il suffit d’en faire la demande. Nous n’avons aucune raison de ne pas nous ouvrir pour faire savoir ce que nous faisons à la population tchadienne et au delà de l’opinion nationale l’opinion internationale. Vous m’avez posé un problème de l’heure. La situation sociale des travailleurs ne date pas d’aujourd’hui. Ce problème date depuis des années. Il a fallu que nous arrivions en 2003 pour avoir quelques ressources supplémentaires nous permettant de voir dans quelle mesure ces préoccupations du travailleur qui est aussi notre préoccupation de voir améliorer la condition de vie de nos citoyens et des travailleurs du public comme dans le privé. Le gouvernement a fait beaucoup d’efforts en très peu de temps. Nous avons augmenté le salaire des travailleurs de plus de 300% en moins de 10 ans. Certes, on peut penser que le Tchad est un pays pétrolier. Nous ne sommes pas du tout un pays pétrolier. Vous produisez moins de 150 barils. Vous balancez entre 30, 60 et 120 barils depuis pratiquement 4 ans. Sur ces ressources, vous n’êtes pas dans la production et vous n’avez pas de participation au sein du consortium. Ce que vous recevez ne sont que des dividendes qui sont de 12,5%. La convention de 1988 et son application qui doit durer 25 ans. Nous avons essayé de faire passer pour tout ce qui était arrivé après les sociétés de recherche et d’exploitation par une loi prise à l’Assemblée nationale de passer de 12% à 14,5%. Pour autant, les ressources directes sont des ressources qui s’amenuisent et qui s’adaptent aussi à la production. Quand la production chute, évidemment les ressources du pays diminuent. Quand la production vous n’avez pas d’autre argent. C’est ce que vous recevez qui vous sont verser c’est-à-dire les 12,5%. On ne peut pas dire que nous sommes un pays pétrolier. Les ressources autres que les ressources du pétrole sont l’Impôt sur les sociétés (IS) qui tombent chaque trois mois. Le bénéfice dépend aussi de beaucoup de paramètres. Il ya d’abord le coût de production. Chaque année, il y a des investissements que les pétroliers font pour chercher à produire plus. Ce sont des investissements qui coûtent cher par rapport au budget arrêté par la société. Deuxième élément : le coût du transport. Il coûte de plus en plus cher même si il n’y a aucune raison pour qu’on augmente le coût du transport d’autant plus que les sociétés ont déjà amorti les investissements qu’elles ont faits au départ. Nous sommes en discussion avec les pétroliers. Le reste des secteurs qui génèrent des ressources sont des secteurs connus : ce sont les impôts, les douanes et les domaines. Je ne pense pas que dans ce secteur là il y’a eu une évolution économique spectaculaire. Ces secteurs restent des secteurs qui ne produisent pas beaucoup de ressources. Nous devons compter en jumelant les ressources pétrolières et les ressources directes traditionnellement connues, Nous avons dépassé aujourd’hui un cadre très important en termes de la masse salariale. On a dépassé nos ressources hors pétrole. Nous sommes autour de 380 milliards. Avec ce qui se passe actuellement, si par malheur et je ne le souhaite pas ; la production chute encore d’avantage, vous ne pourrez pas payer régulièrement et entièrement les salaires, non plus tenir la dette extérieure qui est une dette lourde de plus de 800 milliards FCFA. Vous décaissez par an autour de 35 à 40 milliards. Ajoutez à cela les investissements publics que nous faisons, des équipements, des routes et autres ou encore les équipements sociaux de base. Nous avons deux choix : soit on arrête l’ensemble des investissements que nous faisons et orienter l’ensemble de ces ressources là vers les salaires. Ce cas de figure a eu lieu sous d’autres cieux en Afrique et ailleurs où des pays pétroliers dans les années 70 et un peu avant où les pays ont augmenté sensiblement, par la pression de la rue, la pression sociale, la masse salariale. Ces pays ce sont rendus compte après 30 ans que la production du pétrole n’a pas servi à grand-chose au-delà des fonctionnaires de l’Etat mais le reste de la population n’a bénéficié de rien. Ni en termes d’infrastructures scolaires ni en termes d’infrastructures sanitaires et moins encore les conditions de vie de cette masse de 80% qui est du monde rural. Les fonctionnaires au Tchad vous êtes à moins de 80000. S’il faut un budget pour supporter les 80000 sur des ressources qui ne sont pas sûres, les ressources qui sont sûres sont celles qui sont générées par les grandes régies financières que je viens d’énumérer et qui ne dépassent pas 380 ou 400milliards FCFA par an. C’est pour cela que nous essayons de faire comprendre aux travailleurs, d’ailleurs il y a un schéma et ce schéma aussi a été vécu par les autres pays qui ont eu le pétrole avant nous. Plus vous augmentez les salaires évidemment cela a une influence directe sur la vie quotidienne parce que les prix des produits de première nécessité grimpent. Quand vous augmentez de 5% les prix grimpent de 5 même plus. Sous d’autres cieux, pour augmenter les salaires, il existe des paramètres de calcul. On prend ces paramètres là par rapport au train de vie du pays, par rapport aux ressources du pays, par rapport au coût de la vie. On indexe le chiffre correspondant c’est-à- dire que dans ce calcul, le chiffre correspondant pour augmenter le salaire de manière à ce que le salaire arrive à un niveau permettant aux fonctionnaires de tenir les 30 jours qui suivent. Ce paramètre de calcul n’est pas effectué au Tchad. On fait des augmentations pour augmentation par la pression, par les grèves sèches qui nous ont amené à augmenter. Nous continuerons. Vous augmentez aujourd’hui de 150 points comme nos partenaires sociaux le de – mandent, vous augmenterez d’un autre côté le coût de la vie de 150%. Les commerçants ne sont pas bêtes eux aussi. Ils suivent eux aussi et puisqu’il y a beaucoup d’argent en circulation fatalement c’est ce qu’on crée. L’augmentation du coût de la vie. Pour éviter cela, il faut que les partenaires sociaux et le gouvernement s’entendent d’abord sur les méthodes de calcul avant d’entrer dans des négociations. Ces méthodes de calcul se fait ailleurs, en Europe et dans tous les pays. Si on appliquait simplement ces méthodes de calcul, les augmentations ne seront pas de 10%, de 15% ou de 30%. Elles seront de 2%, 3%, 4%. Là, il paraît que nos partenaires refusent. Il y a des choix à faire à ce niveau. Puisque les possibilités qui sont les nôtres ne sont pas cachées mais bien connues, j’ai dit restons sur la table et mettons les choses à plat sur la table : voilà nos possibilités, voilà le budget qui est voté. Qu’est ce qu’on doit investir au courant de l’année. Voilà ce qui reste. Voilà le fonctionnement, voilà la dette. Qu’est ce qu’il faut augmenter et qu’est ce qu’il faut réduire. Chaque fois que vous réduisez l’un vous réduisez l’autre. C’est pourquoi les travailleurs doivent pouvoir aller progressivement et ne pas également, par la faute de leurs revendications, permettre aux commerçants véreux faire de la spéculation. Cette spéculation est naturelle puisqu’il y a beaucoup d’argent. Dans les années 90, le SMIG au Tchad était de 2 000 ou 3 000 FCFA. Nous avons augmenté progressivement pour arriver à 27 000 FCFA. Maintenant nous sommes à 60 000 FCFA. Ce n’est pas trop pour quelqu’un qui a une famille il ne peut tout couvrir avec 60 000 FCFA. Retrouvez l’intégralité de l’interview dans Notre Temps #523 disponible
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