N’DJAMENA, 17 mars (Xinhua) — Avec le lancement officiel d’un logiciel de Gestion informatisée et sécurisée de requêtes d’acquisition foncière (dénommé GIRAF 2) et l’adoption d’un projet de Code domanial, la semaine dernière, le Tchad fait de nouveaux pas importants dans la grande réforme de son foncier, entreprise depuis près de deux ans.

“GIRAF 2 est un service innovant, adapté aux besoins spé cifiques et à la législation tchadienne. On n’aura plus de dossier physique qui va passer de main en main et de bâtiment en bâtiment. Le logiciel GIRAF 2 est très utile parce qu’il va permettre l’accè s à l’information en temps réel, et surtout il n’y aura qu’une seule source d’information”, a déclaré à Xinhua Abba Zène Badaoui Djidda, secrétaire général du ministère tchadien de l’Urbanisme, de l’Habitat, des Affaires foncières et des Domaines.

La mise en oeuvre de ce nouveau logiciel offre, selon lui, plusieurs fonctions: constitution d’une base de données informatis ées, suivi et traitement des dossiers, circulation de l’information jusqu’à l’obtention du titre foncier, etc. Pour cela, toutes les directions et services techniques seront reliés à travers le déploiement de 80 ordinateurs interconnectés.

“Désormais, nous pourrons traiter les différents documents dans des conditions techniques et sécuritaires très appropriés, de mani ère à mettre les propriétaires fonciers dans de bonnes conditions et à éviter les faux documents qui circulent et qui font que les problèmes fonciers constituent aujourd’hui 80 à 90% des problèmes qui pendent en justice”, a indiqué M. Abba Zène Badaoui Djidda.

Pour le ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat, des Affaires foncières et des Domaines, Gata Ngoulou, cette nouvelle méthode d’informatisation des données cadastrales est une révolution dans le domaine foncier et domanial. “Une personne peut avoir plusieurs parcelles, mais une parcelle ne peut jamais avoir plusieurs attributaires”, a-t-il affirmé, faisant référence à la double attribution d’un même terrain qui constitue la principale cause des conflits fonciers dans son pays.

Depuis près de deux ans, le Tchad multiplie les actions pour moderniser ses Domaines et Cadastre. Ainsi, un Guichet unique des affaires foncières est opérationnel à N’Djaména, la capitale du Tchad, depuis juin 2013. Il est l’oeuvre du Programme de sé curisation des documents cadastraux, fonciers et domaniaux, fruit d’un partenariat entre l’Etat tchadien et la Groupe Oberthur Fiduciaire, une société de droit français.

La première phase de ce Projet de sécurisation, lancé en août 2012, a consisté à mettre en conformité les bâtiments, à installer les différentes infrastructures, à numériser les documents cadastraux, à faire des opérations de photogrammétrie et à mettre en place un groupe de logiciels.

La seconde phase, qui devra durer cinq ans, est celle de la dé livrance des documents sécurisés à travers ce Guichet unique qui servira d’interface entre l’administration foncière et domaniale et les usagers.

Aujourd’hui, au Tchad, seuls 4.092 titres fonciers ont été é tablis pour tout le pays, alors que le titre foncier n°1 date de 1914. Faute de moyens adéquats, d’importants gisements de ressources budgétaires demeurent ainsi inexploités par l’Etat.

Le Guichet unique permettra de rassurer les usagers et de ré duire les conflits dont la plupart naissent de la manipulation frauduleuse des documents par les agents du ministère eux-mêmes, selon M. Gata Ngoulou. En effet, près de 80% des dossiers en instance de jugement devant les tribunaux au Tchad concernent des questions foncières, selon des sources judiciaires.

Durant la première phase du Projet de sécurisation, la société Oberthur avait scanné l’ensemble des documents fonciers existants, notamment les plans A Zéro, les plans parcellaires et les registres des titres fonciers; puis elle a inclus ces données anciennes dans un nouveau logiciel performant.

Des vues aériennes des 11 plus grandes villes du Tchad ont été réalisées, et des photos en 3D prises. Les parcelles dument scanné es et enregistrées dans le nouveau logiciel, seront ensuite superposées sur les photos aériennes en photogrammétrie et un gigantesque puzzle sera ainsi réalisé. Les données sont traitées actuellement à Dijon, en France. Il faudra ensuite procéder aux ajustements nécessaires entre ce qui est réalisé matériellement (par exemple, la construction d’une maison ou d’un immeuble) et ce qui est enregistré au sein des registres du Domaine et du Cadastre.

La réforme foncière entreprise au Tchad se joue également sur le terrain juridique. Des lois fixant les principes fondamentaux applicables en matière d’urbanisme et de construction avaient été promulguées par le président Déby Itno ces dernières années. Mais le foncier, un secteur devenu délicat et sensible, reste soumis à des textes déphasés, vieux de plus trois décennies. Ainsi, un Code domanial et foncier est en cours d’élaboration et viendra complé ter cet arsenal juridique.

Le nouveau Code domanial et foncier devra être adopté par l’Assemblée nationale au cours de la prochaine session qui s’ouvre en avril. Ce sera l’une des dernières grandes étapes de cette vaste réforme foncière. Le dernier élément important du dispositif reste la Banque de l’habitat; les actes juridiques pour sa cré ation sont en train d’être finalisés par le gouvernement tchadien.