Plus de 20.000 Centrafricains, en majorité des femmes et des enfants, sont arrivés ces trois dernières semaines dans le sud du pays, fuyant les exactions et violences dans le nord de leur pays. Tchadinfos.com est allé à leur rencontre.

A Békoninga, à 7 kilomètres de la frontière centrafricaine, ils sont des milliers sous des manguiers en pleine floraison, assis ou couchés à même le sol. Ils sont à 95% des femmes et des enfants dont beaucoup sont non accompagnés. A leur arrivée, c’est le chef de village lui-même, Pierre Romba qui les enregistre, en attendant les agents du Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés (HCR).

Car pour le moment, les réfugiés de Békoninga ne reçoivent aucune aide matérielle. “Nous sommes dans la phase d’accueil et de pré-enregistrement”, a déclaré Réoutar Hyppolite, chef de l’équipe HCR dépêchée à Békoninga. Pendant cette période, les demandeurs d’asile ne reçoivent aucune aide matérielle. Seule une assistance psychosociale est donnée aux plus vulnérables: personnes âgées, femmes enceintes et enfants. L’ONG ADES fournit des soins médicaux aux malades.

Dans le canton Oudoumian, dans la sous-préfecture voisine de Bessao, c’est la même situation dramatique. Plus de 2.600 Centrafricains ont été enregistrés dans les dix-huit villages dépendants d’Oudoumian, situé à 8 kilomètres de la frontière centrafricaine. Mais ici, contrairement à Békoninga, les réfugiés ont commencé à affluer dès le 18 décembre 2017; les opérations de secours sont donc plus avancées. Une première distribution de vivres et de non-vivres a été effectuée la semaine dernière.

“Nous avons accueilli tous nos frères centrafricains à bras ouverts, même ceux qui n’ont pas de familles ici. Nous nous débrouillons à dormir ensemble dans des cases, même si c’est trop serré”, a confié Rimbaneang Joël, chef de canton d’Oudoumian.

A Békoninga, “les premiers arrivés qui ont des familles ici, ont eu la chance d’être mis dans des cases. Ceux qui ont suivi, sont dans des salles de classe, d’autres encore sous des arbres car nous ne pouvons pas héberger tout le monde”, a renchéri son chef de village, Pierre Romba.

A Oudoumian, comme à Békoninga et dans les différentes zones où les Centrafricains affluent, le problème d’hébergement se pose avec acuité. Avec les dernières pluies, beaucoup de toitures des cases ont été détruites et n’ont pas encore été reconstruites. L’hiver bat son plein et avec le cours d’eau qui borde le village, il fait très froid, ce qui risque de provoquer de nombreuses maladies.

Malgré la fermeture officielle de la frontière commune entre le Tchad et la RCA, les autorités du département de la Nya-Pendé ont facilité l’entrée des demandeurs d’asile en territoire tchadien, comme en 2016 et 2017 où les afflux étaient moins importants. “Depuis le début de cette crise et bien auparavant, les autorités se sont toujours montrées très hospitalières avec un grand sens de la solidarité. Dans toutes nos interventions, que ce soit dans la recherche des sites en vue des villages hôtes, on travaille en étroite coopération avec les autorités”, s’est réjoui….

Le chef de la protection du HCR à Goré a également salué la solidarité légendaire et exemplaire des populations de la région. “On pourrait être dans une situation humanitaire beaucoup plus difficile si l’ensemble de cette population nouvellement arrivée n’avait pas pu trouver asile au sein de ces villages et directement au sein des familles avec des abris”, a-t-il précisé.

Mais pour le HCR et les autorités de la Nya-Pendé, la communauté internationale doit continuer à  et populations tchadiennes ne doit pas occulter l’urgence. “Ce qui se passe aujourd’hui avec ces nouveaux afflux met en lumière que la situation en RCA n’est pas résolue. On a souvent tendance à dire que c’est parfois une crise oubliée. Il faut qu’elle ne soit plus oubliée”, a plaidé Jérôme Merlin.

“Pour pouvoir répondre à ces urgences-là, nous avons encore besoin des appuis des bailleurs de fonds qui font déjà beaucoup d’efforts, mais il faut que ce soit des efforts continus”, a-t-il ajouté.

Même son de cloche de la part du préfet de la Nya-Pendé qui déplore que “les grands donateurs [soient] tournés vers les crises mondiales (la Syrie, l’Irak, la Palestine, les migrants, etc.) oublient la crise centrafricaine”.

“Nous avons besoin de moyens pour secourir ces milliers de personnes qui affluent vers nous. Les bailleurs de fonds doivent continuer à nous aider”, a conclu Youssouf Oumar Bahar.