Au Tchad, seuls 18% de la population ont accès à des toilettes décentes, le reste s’adonne à la défécation à l’air qui crée de nombreuses maladies et un manque à gagner de 79 milliards FCFA chaque année.

Avoir des toilettes modernes au Tchad est un luxe. Beaucoup de Tchadiens ne disposent pas de toilettes qui répondent au standard moderne. Des fosses, dont la profondeur et la largeur varient au gré de leurs fabricants, servent de latrines pour les Tchadiens.

Les plus nantis aménagent un peu l’intérieur de leurs fosses en construisant la paroi avec des briques cuites renforcées avec du ciment et couverts d’une dalle décapotable. Le curage des déchets se fait dans des conditions lamentables et risquées pour la santé humaine. Les moins nantis se contentent de simples trous creusés dans un coin de la cour. Une fois le plein fait, on bouche le trou et un autre endroit est choisi pour faire des toilettes de fortune, partagées par plusieurs ménages.

Selon un rapport de l’UNICEF, plus de 2 milliards de personnes n’ont pas accès aux latrines, 1 milliard d’entre elles défèquent à l’air libre.

Au Tchad, malgré la mise en place d’un schéma directeur Eau et Assainissement 2003-2020 approuvé par l’Etat et appuyé par les partenaires techniques et financiers, ce sont plus de 7 millions de personnes qui n’accèdent pas encore à des installations sanitaires de base. Le taux actuel d’accès à un assainissement est de 18%. Plus de 80% de la population rurale pratiquent la défécation à l’air libre et moins de 20% se lavent les mains avec du savon ou des cendres comme du temps où il n’y avait pas de savon. 85% de la pollution issue des activités de l’homme repart en milieu sans épuration.

Particulièrement à N’Djaména, la capitale qui compte plus d’un million d’habitants, seuls 29% de ses habitants ont accès à un robinet dans leur logement, tandis qu’un tiers s’approvisionne chez les voisins ou à des robinets publics. Plus de 93% des ménages utilisent des toilettes, mais souvent partagées et la défécation à l’air libre est largement répandue dans les zones non aménagées de la ville dont certaines sont inondées en saison des pluies, faute d’un système de canalisation performant.

“Ce manque d’infrastructures a des conséquences néfastes sur le développement de la santé des familles et des enfants”, déclare Philippe Barragne-Bigot, représentant de l’UNICEF au Tchad. Les statistiques sanitaires montrent que le manque d’eau potable et les conditions défavorables d’hygiène font partie des principales causes de la mortalité et de la morbidité au sein de la population tchadienne.

Selon la dernière étude du programme Eau et Assainissement 2014, 19.000 cas de décès dont 15.000 enfants sont dus aux maladies liées au manque d’hygiène, eau et assainissement et presqu’un enfant sur cinq en souffre au quotidien. Les maladies comme le paludisme, la rougeole, la diarrhée, le choléra sont directement liées à un manque d’infrastructures sanitaires de base qui induit chez les populations des habitudes de vie des comportements contraires à une bonne hygiène et assainissement dans les villes.

“Au Tchad, la défécation à l’air libre constitue une réelle préoccupation tant au milieu rural qu’urbain. Selon le programme Eau et Assainissement, le Tchad perd 79 milliards FCFA chaque année à cause d’un mauvais système d’assainissement”, précise Mahamat Alifa Moussa, secrétaire général du ministère tchadien de l’Eau et de l’Assainissement.

Face à cette situation délicate, il exhorte à mettre, de toute urgence, les bouchées doubles pour unir les forces afin d’obtenir des résultats tangibles. “Il faut absolument donner à l’assainissement une place centrale dans le cadre du développement de la République”, insiste M. Moussa.

Trois obstacles freinent un accès à l’assainissement pour tous : le manque de capacité et de ressources au niveau des communes pour la gestion de l’assainissement urbain, l’absence d’un système de gestion des déchets et la mauvaise pratique au niveau des ménages. Le gros obstacle reste les mentalités, difficiles à changer avec le degré d’alphabétisme de la population et de l’éducation sanitaire.