Ancien résistant, diplomate et écrivain, Stéphane Hessel est mort dans la nuit du mardi 26 au mercredi 27 février à l’âge de 95 ans, a annoncé son épouse, Christiane Hessel-Chabry. Homme de gauche, Stéphane Hessel a mené une grande carrière de diplomate atypique et a connu une immense notoriété il y a deux ans avec le succès phénoménal de son petit livre Indignez-vous !. Francetv info revient sur le parcours exceptionnel de cet humaniste engagé et “indigné”.

Le résistant

Né le 20 octobre 1917 à Berlin, “l’année de la révolution soviétique”, aimait-il à rappeler, dans une famille juive convertie au luthéranisme, il arrive en France en 1925. Sa mère, Helen Grund, est le modèle de Catherine dans Jules et Jim, l’histoire d’une femme aimée par deux amis que François Truffaut a porté à l’écran en 1962. Son père, lui, traduit Proust en allemand avec le philosophe Walter Benjamin.

Naturalisé en 1937, reçu à Normale Sup en 1939, Stéphane Hessel, qui parle allemand, français et anglais, est l’incarnation de l’intellectuel européen. Il suit les cours de Merleau-Ponty, lit Sartre. Mobilisé en 1939, fait prisonnier, il s’évade et rejoint Charles de Gaulle à Londres. Envoyé en France en 1944, il est arrêté et déporté à Buchenwald. Il maquille ensuite son identité pour échapper à la mort. Après s’être évadé, il rallie les troupes américaines et rejoint Paris en mai 1945.

Le diplomate

A la Libération, il entame une carrière diplomatique comme détaché au secrétariat général de l’ONU (1946-1951). Il participe à l’élaboration de la Déclaration universelle des droits de l’homme, sans en être rédacteur. Il est ensuite notamment conseiller au cabinet de Pierre Mendès France (1954-1955), premier conseiller à Saïgon (Vietnam) (1955-1957), conseiller puis chef de la mission culturelle et universitaire à Alger (1964-1968). En 1975, alors conseiller du ministre de la Coopération, il échoue dans sa mission pour faire libérer l’ethnologue Françoise Claustre, otage au Tchad.

Nommé président de l’Office national pour la promotion culturelle des immigrés, il est ensuite représentant permanent de la France auprès de l’Office des Nations unies en 1977. De 1981 à 1983, il est délégué interministériel pour les questions de coopération et d’aide au développement. Stéphane Hessel a aussi été membre de la Haute Autorité de la communication audiovisuelle (1982-1985), du Haut Conseil à l’intégration (1990-1994) et du Haut Conseil de la coopération internationale (1999-2003).

Ancien membre de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (1992-2005), il est resté très actif après sa retraite, notamment en tant que médiateur pour les sans-papiers en 1996-1997.

L’écrivain

Grand officier de la Légion d’honneur, Croix de guerre, Rosette de la Résistance, Stéphane Hessel a publié Danse avec le siècle (1997), Dix pas dans le nouveau siècle (2002), Citoyen sans frontières (2008), Le Chemin de l’espérance avec Edgar Morin (2011), Engagez-vous (2011), livre d’entretiens avec Gilles Vanderpooten, qui fait suite à Indignez-vous !, son manifeste paru en 2010.

En 2012, Stéphane Hessel et Albert Jacquard ont conjugué leurs voix pour lancer un appel contre l’arme atomique dans Exigez ! Un désarmement nucléaire total.

L’indigné humaniste

C’est son manifeste Indignez-vous ! (Ed. Indigène), vendu depuis octobre 2010 à quelque 4 millions d’exemplaires dans le monde, qui en a fait une célébrité. Le terme “indignés” a été repris par les manifestants du Mouvement des indignés, notamment en France, en Espagne et en Grèce. Son best-seller a aussi inspiré le mouvement Occupy Wall Street aux Etats-Unis. Ce succès foudroyant “est encore un étonnement pour moi mais cela s’explique par un moment historique. Les sociétés sont perdues, se demandent comment faire pour s’en sortir et cherchent un sens à l’aventure humaine”, confiait-il en mars 2012.

Stéphane Hessel est aussi connu pour ses prises de position concernant les droits de l’homme, le droit d’asile et l’accueil des migrants. Il milite pour les Palestiniens, ce qui lui vaut les foudres des associations juives.

En politique, il a suivi Pierre Mendès France, soutenu Michel Rocard en 1985, s’est présenté en 2010 en position inéligible sur les listes d’Europe Ecologie et a apporté en 2012 son soutien au candidat PS à la présidentielle François Hollande.