DAKAR, 11 juin (Xinhua) — La sous-représentation des femmes dans les instances de décisions en Afrique a été considérée comme un manque de démocratie et un frein au développement, lors d’une rencontre, jeudi à Dakar, sur les enjeux et perspectives de l’avenir du continent.

“L’accès des femmes au pouvoir est très important pour des sociétés qui se disent démocratiques”, a estimé le professeur Felesiah Arudo Yieke de l’université de Laikipia au Kenya.

“Mais il y a beaucoup d’inégalités au plan politique puisque la majorité des postes de décision en Afrique est occupée par des hommes”, a-t-elle regretté avant de soutenir qu'”on ne peut pas avoir de vraies démocraties quand il n’ y a pas d’égales opportunités pour tous”.

“L’autonomisation des femmes n’est pas une réalité parce qu’ elles ont encore une tactique de survie qui est de s’aligner derrière les hommes. Elles ne sont pas intégrées dans l’élaboration des programmes de développement mais sans leur participation aucun développement ne peut être durable”, a-t-elle ajouté.

Elle est d’avis que “la scolarisation des filles et l’accès des femmes à l’enseignement supérieur et à la formation professionnelle peuvent aider les femmes à occuper de hautes fonctions”.

De son côté, le sociologue nigérian, Adediran Daniel Ikuomola, a expliqué que dans son pays “ce sont les régimes militaires qui n’ ont pas favorisé l’accès des femmes à des postes de responsabilité, en plus de l’ oppression patriarcale qui réduit la fonction de la femme au rôle d’ épouse et de mère”.

“Elles sont véritablement très actives dans la vie politique mais cela ne profite qu’ aux hommes. La plupart des femmes n’ arrivent pas à s’ imposer dans les partis politiques parce qu’ elles ne sont pas mises dans les conditions d’ exercer des rôles déterminants”, a-t-il relevé.

Cependant, a-t-il constaté, “elles sont plus intéressées par les postes nominatifs et il faut qu’ elles travaillent en coalition pour combattre la domination des hommes dans la politique et également dans les autres sphères”.

“Du point de vue économique, les femmes africaines sont les plus pauvres parmi les plus pauvres dans le monde à cause surtout de leur analphabétisme”, a, pour sa part, soutenu Maria Teresa Henriques Da Cunha Martins de l’université de Coimbra au Portugal.

“Les gouvernements africains ont, en général, des visions macroéconomiques complètement déconnectées des réalités alors que les femmes sont comme des économistes sociales qui connaissent les besoins de la population”, a-t-elle argué.

Elle a conclu qu'”il faut donner plus de pouvoir aux femmes pour consolider les démocraties africaines et favoriser un développement social plus large”.

Evoquant la présence des femmes dans les parlements africains, le docteur en sciences politiques, Anta Sané, a donné l’exemple du Sénégal en faisant remarquer que “même avec la loi sur la parité, les femmes ne représentent pas une force puisqu’elles sont 64 députés dans une Assemblée nationale qui en compte 150”.

“Certaines femmes députés n’ ont pas de compétences ni d’ expériences. La langue constitue aussi une barrière pour celles qui n’ ont pas fait l’ école puisque le français est langue officielle à

l’Assemblée”, a-t-elle soutenu avant de proposer la traduction des débats en français dans les langues nationales.

“Les femmes représentent 52% de la population béninoise et il n’ y a que 7 femmes sur les 83 députés que compte l’ Assemblée nationale du Bénin”, a, pour sa part, indiqué le docteur en sciences politiques Hinnougnon Nathaniel Kitti de l’ université d’ Abomey-Calavi.

“Il est important que les débats se fassent en langues nationales mais je ne crois pas que la langue ou le manque de compétences soient la cause de cette situation”, a-t-il soutenu.

“Il y a un manque de volonté des femmes de s’engager dans l’ espace politique qu’elles ont toujours considérées comme une sphère des hommes”, a-t-il expliqué.