L’ordonnance 006/PR/2015 fixe l’âge minimum du mariage à dix-huit ans révolus. Mais jusque-là les Tchadiens rechignent à respecter cette loi. Pour beaucoup d’entre eux, le mariage n’est pas une affaire de loi mais plutôt une affaire de religion et de tradition.

Chaque jour, des centaines voire des milliers  de mineures, à N’Djamena ou ailleurs sont mariées de gré ou de force. « Je ne peux pas attendre jusqu’à 18 ans pour donner ma fille en mariage », dit un père de famille. « Dès qu’une fille atteint l’âge de puberté, elle n’est plus maîtrisable. Elle peut faire ce qu’elle veut et échappe au contrôle de ses parents », souligne un autre.

Face à ces raisonnements et les pratiques observées, l’on se rend compte que la loi portant interdiction du mariage des enfants est en déphasage avec les réalités culturelles et religieuses d’une partie de la société tchadienne.

Garder une fille jusqu’à 18 ans est une charge énorme pour les uns et un risque pour les autres. « De nos jours à 12 ou 13 ans déjà, les filles ressemblent à des mamans. C’est-à-dire leur organisme est développé aussi petites qu’elles soient. De telles filles, si on les garde jusqu’à 18 ans et dans notre société que nous connaissons…..C’est le gâchis » s’indigne Mahamat Youssouf, père de famille.

Pour l’imam Oumar Hassabannabi, dans la religion musulmane, ni dans le Coran ni dans les hadiths (paroles du prophète) il n’est déterminé un âge pour le mariage. Il prend pour preuve le mariage du prophète Mohamed (paix et bénédictions sur lui) avec Aicha alors qu’elle n’avait que neuf (9) ans. Partant de là, l’islam n’interdit pas le mariage des enfants. « Mais dans le cas où une fille ne peut pas supporter le mariage et ça peut lui causer de torts ou un problème de santé, on doit automatiquement annuler le mariage pour préserver sa santé », instruit-il. En outre, pour lui, il y a des filles qui, à  moins de 18 ans, peuvent bien gérer un foyer.

L’interdiction du mariage des enfants semble être ignorée. L’Etat doit davantage mettre en place un arsenal juridique qui sanctionne sévèrement tous ceux qui portent atteinte à l’honneur et la dignité d’une mineure. Ainsi, on peut accompagner et rassurer davantage les parents.