L’ablation de la luette, pratique traditionnelle très ancienne, demeure encore vivace au Tchad. Elle consiste à couper la luette pour “évacuer les humeurs du cerveau’’. Pratiquée dans des conditions d’hygiène désastreuses, elle constitue une menace grave pour la santé de l’enfant du fait des complications qui en découlent.


L’ablation est souvent faite sur des enfants à un âge précoce par des guérisseurs traditionnels ou charlatans sans compétence médicale pour cette intervention. Le personnel médical est marginal.

Une mère de famille confie qu’on lui a dit que “c’est la tradition. Cela permet une bonne articulation des mots, prévient l’angine, facilite les voies respiratoires et fait grossir les bébés”. Mais elle, on lui a fait l’ablation pour perpétrer la coutume. “Ses aïeux l’ont fait, donc (…)”. Par ce même mimétisme, tente de se justifier un charlatan rencontré à Dembé qui affirme “respecter la tradition”.

Une sage-femme, requérant l’anonymat, rapporte avoir été témoin dans un centre de santé qu’une de ses collègues ” a pris 2.000 francs de la main d’une mère pour enlever la luette de sa fille et c’est juste sur demande de cette mère, sans auscultation préalable’’. “La petite fille a souffert des complications durant cinq ans environ avant de décéder”.

Survivance et inconvénients


Pour comprendre la survivance de cette pratique, il faut se référer aux caractéristiques sociodémographiques. Beaucoup de femmes, hommes sans niveau d’instruction pensent que l’ablation de la luette permet d’atténuer les vomissements chez le bébé qui fait ses dents, la toux, empêche les angines, etc. mais selon les corps soignants c’est faux. Même si pour certaines personnes ayant la luette enlevée, aucune anomalie ou infection n’est visible.

Selon les données statistiques du Ministère de la Santé publique sur cette question, aucune tendance ne se dégage entre les protagonistes, qui d’un côté sont pour l’ablation de la luette et de l’autre sont contre cette pratique et la déconseillent fortement tout comme la médecine moderne. Mais les lieux où l’ablation de la luette est pratiquée sont partout visibles dans la capitale. A Dembé, Moursal, Abena, etc. des enseignes placardées au mur ou plaques posées à l’entrée de certaines concessions le prouvent.
Ces données révèlent qu’au Tchad, “au moins un enfant de moins cinq ans sur deux a été victime de l’ablation de la luette malgré la mise sur pied d’une Commission nationale chargée d’élaborer et de mettre en application un code de la famille pour lutter contre les pratiques traditionnelles néfastes telles que l’ablation de la luette, l’excision, l’infibulation”.

“Les inconvénients ou complications survenues à la suite de la procédure ou l’uvulectomie  sont nombreuses. On peut citer entre autres : lésions de la langue, de la lèvre, des douleurs à l’oreille ou les abcès ainsi que des saignements dans les jours suivant. En outre, du fait du manque d’asepsie et l’utilisation d’outils tranchants, les risques de transmission du VIH/Sida sont élevés’’, nous informe Dr Waïdou Ouangba, médecin généraliste.


BACTAR Frank I.