Depuis quelque temps, il est difficile d’avoir ses reliquats en pièces de monnaie. Beaucoup d’usagers de billets de banque se plaignent de cette situation. Comment l’expliquer ?

Scènes presque banale mais édifiantes. Un homme rentre de son travail en mototaxi. Il sort un billet de 5000 francs pour payer le mototaximan à qui il doit 700 francs mais celui-ci dit ne pas avoir de pièces de monnaie. Le monsieur lui demande de patienter le temps d’aller à une boutique voisine pour essayer d’en trouver. Sur place, ne sachant quoi faire car pris au dépourvu, il se résout à acheter du crédit de communication pour 1000 francs alors qu’il n’en avait pas besoin, dit-il.

Theresa vient au marché en bus. A son arrivée, elle sort 500 francs pour payer son bus. L’apprenti chauffeur lui répond violemment : “Tu es comment? Fallait me prévenir si tu n’avais pas de monnaie. Trouve mes 150 francs sinon…”- “C’est tout ce que j’ai. C’est toi le commerçant, c’est à toi de chercher de monnaie”, rétorque-t-elle. Les invectives prennent fin grâce à l’intervention du chauffeur qui demande à la dame de lui donner même 100 francs si elle n’a pas d’autres petites pièces.

Un groupe de trois jeunes venus se restaurer dans une gargote à Chagoua se plaint auprès de la tenancière qui dit ne pas avoir de jetons de 150 francs bien que ceux-ci aient donné 1000 francs et mangé pour 850 francs.

Ida, mère de famille, affirme “ne pas comprendre cette situation car avant il y avait toujours de la monnaie même quand on tendait un gros billet et achetait peu (…)”. Pour le thé du matin, ses enfants sont obligés de faire la tournée des boutiques pour avoir les pièces de monnaie ; Des fois, ils laissent l’argent à la boutique et cela occasionne des dépenses imprévues.

Cette pénurie de pièces de monnaie se pose aujourd’hui avec acuité tant les gens se plaignent à N’Djamena. Dans les magasins, transports urbains, marchés et autres commerces, ce sont les mêmes lamentations. Dans les bars, par exemple, les clients rentrent généralement avec des “avoirs”.

Un comptable d’un restaurant huppé confie qu’il a l’habitude d’échanger de la grosse coupure contre de la petite coupure au niveau des banques pour ses clients. Mais depuis quelques jours, plus rien. Une caissière lui a confié que ce problème est plus ressenti maintenant parce que la monnaie est vidée des banques pour la campagne présidentielle. “Ils veulent les billets de 500, de 1000, de 2000 francs pour faroter (distribuer) avec…”, lui souffle-t-elle.

D’après un économiste-juriste, qui a requis l’anonymat, “Cette situation est imputée à la banque centrale qui est responsable de la gestion monétaire et non à l’État, qui ne s’occupe que de la politique budgétaire. Le manque de petites coupures ou monnaies divisibles ne peut être affirmé qu’après constant et étude sur le terrain. S’il y a problème de monnaie, le premier concerné, c’est la banque centrale. On ne peut doigter une autre personne qu’elle; dans notre cas, c’est la BEAC ( Banque des États de l’Afrique centrale). Elle a une représentation dans chaque État membre, selon les orientations et normes de la direction centrale de Yaoundé, en tenant compte des réalités de l’État et ses populations (…)”.

BACTAR Frank I.