La journée mondiale de la liberté de la presse se célèbre ce 3 mai. Au Tchad, au vu des difficultés que rencontrent les  journalistes, les avis sont partagés sur la question.

Ayati Nathan a fait ses premiers pas dans le journalisme en 2017. Après quatre ans, et plusieurs rédactions parcourues, alternés de ‘’temps morts’’, Nathan travaille aujourd’hui dans un journal. Pour lui, les journalistes jouissent d’une certaine liberté dans l’exercice de leurs fonctions.  « Il y a quand-même une amélioration de la liberté de la presse. Les journaux arrivent à paraître et à dénoncer certains maux qui minent la société », souligne-t-il, déplorant toutefois que les journalistes soient tout le temps menacés par des groupuscules qui se croient intouchables, arrêtés, convoqués au niveau de la Haute autorité des médias et de l’audiovisuel (HAMA) et de la justice.

« Quelquefois, quand vous écrivez quelque chose, ils viennent derrière vous au journal pour vous demander de prendre une somme d’argent et de retirer l’information que vous aviez déjà diffusée », regrette-t-il.

Au-delà de ces menaces et intimidations, Nathan pense que la précarité dans laquelle baigne les professionnels des médias les rend vulnérables. «  Au niveau du pays, la presse ne paie pas. Les journalistes sont mal payés. Quand c’est ainsi, votre esprit n’est pas tranquille pour bien faire le travail. Vous ne pouvez pas subvenir aux besoins, parfois élémentaires de la famille. Vous n’êtes pas libre ».

Namia Christelle, jeune journaliste d’une radio privée, trouve elle aussi que la liberté de la presse se vit. « La liberté de la presse est une réalité, surtout pour nous les journalistes de la nouvelle génération. Cela ne nous empêche pas de déplorer quelques exactions commises sur les journalistes. Il y a encore un travail à faire pour que cette liberté soit totalement effective », interpelle-t-elle, demandant à ses confrères d’être responsables dans leurs productions. « La liberté nous est donné, certes. Il faut qu’ils ( journalistes) soient responsables du point de vue de la production. Cette liberté ne doit pas être du libertinage », lance-t-elle.

Malgré que le journalisme est un « métier qui ne paie pas trop au pays », la vingtaine dit le pratiquer avec passion. « C’est un peu difficile de s’en sortir à moins qu’on l’associe à d’autres activités. C’est ce que j’essaye de faire pour m’en sortir réellement. C’est une passion donc je l’exerce avec fierté. Au niveau de la radio, on est en sous-effectif. Plusieurs tâches reposent sur une personne », relate-t-elle, confiant travailler (différentes activités) régulièrement de 7 heures à 19 heures.

Djegolbé Kodé, journaliste d’une télévision privée, dénonce une « marginalisation » qui « bat son plein » dans le journalisme. « On travaille chaque jour et les retombées ne sont pas satisfaisantes. Au Tchad, les journalistes courent derrière l’argent et non derrière l’information ». Au regard de ces difficultés, tranche-t-il, la liberté de la presse n’est pas une réalité.

Ayati Nathan et Namia Christelle, rappelant le « sacrifice » que font les journalistes pour mettre à la disposition du public l’information, demandent à l’État de s’investir davantage pour garantir et protéger la liberté de la presse, par notamment une allocation régulière des moyens financiers.