PORTRAIT – Du Tchad à l’Inde, Kadi se trouve aujourd’hui aux États-Unis d’Amérique. Coup de projecteur sur le monde d’une influenceuse tchadienne qui parle dix langues. Mais pas seulement.

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Il n’est pas facile de la contacter. La reine des réseaux sociaux refuse de parler aux journalistes au téléphone. Nous passons donc par Instagram pour lui demander son numéro WhatsApp. Un rendez-vous est vite calé selon son programme et suivant ses horaires. Nous allons échanger par messages. Après les salutations d’usage et une quinzaine de minutes de conversations, Khadidja Djibrine, connue sur la Toile au nom de Kadi (@itsnotkadi), prend goût à l’exercice, son stress disparaît. Et la voilà qui se confie.

« Sur TikTok, je me sens tellement aimée par mes fans que je dois toujours chercher à faire plus », assure celle qui est suivie par plus de 122 000 personnes sur l’application mobile chinoise de partage de vidéos. Et elle dit avoir la même motivation sur Instagram.

Kadi est une influenceuse. C’est à travers les réseaux sociaux qu’elle s’est faite connaître dans le monde. Son préféré reste TikTok. Elle y fait des petites capsules de vidéo d’elle en parlant plusieurs langues sur différents sujets. Sur d’autres, ses followers peuvent la voir danser.

@itsnotkadi

I’m probably late but i love this song @meghantrainor ##FrostedFeelings ##foryoupage ##dance

♬ Nice to Meet Ya – Meghan Trainor feat. Nicki Minaj

Connaissant la puissance des réseaux sociaux, elle en use considérablement pour vendre son image. « On peut beaucoup faire avec Internet. Moi, c’est à travers Internet que j’ai obtenu des contrats avec des compagnies privées et publiques, en tant que traductrice à Los Angeles », explique-t-elle.

Kadi a appris l’anglais et le hindi par le biais de la télévision. Elle est férue de films et musiques de tout genre. Aujourd’hui, cette jeune dame de 26 ans parle 10 langues dont sept de façon courante : arabe, français, anglais, espagnol, hindi, ourdou et arabe tchadien. Elle comprend et apprend le farsi, le mandarin et le marathi.

@itsnotkadi

Marathi madhe bolu ##fyp ##marathi ##Polyglot ##JustAddGlitter ##onmyway

♬ original sound – itsnotkadi
Mais qui est vraiment Kadi ?

Cette polyglotte, née et grandie à N’Djamena, est pourtant issue d’une famille modeste. Mais, elle ne veut pas s’étendre sur sa vie privée. Selon son entourage, elle est musulmane et appartient au Grand Nord. Kadi est issue d’une famille nombreuse de neuf filles et trois garçons. Elle n’est pas l’ainée ni la benjamine : elle est la deuxième de la fratrie. Un enfant choyée par ses parents qui l’enverront en Inde après l’obtention de son baccalauréat, en 2010.

Là-bas, elle s’adapte très vite parce qu’elle parle déjà la langue du pays. Elle démarre aussitôt sa première année d’étude en management business. Au même moment, elle fait des petits jobs d’interprète pour se prendre en charge sur place. « Moi seule je peux changer ma vie, personne ne le fera pour moi », aime-t-elle à répéter comme un slogan. L’année suivante, elle se lance aussi dans le mannequinat. « C’était vraiment un challenge à cause de ma couleur de peau. Mais je n’ai pas abandonné. Je suis persévérante et ma détermination a fini par payer. J’ai raflé une place à la Fashion Week de Pune, en Inde », se félicite Kadi qui prend toujours la vie du bon côté.

Une fois son diplôme décroché, elle s’envole pour les États-Unis d’Amérique. Elle est actuellement interprète à Los Angeles, en Californie. Cette activité lui permet de percevoir autrement les différentes langues apprises et de les appliquer pleinement. Mais Kadi ne s’arrête pas. En 2018, elle sort son premier single en anglais. Les thèmes évoqués sont l’amour, la question de la jeunesse et les péripéties de la vie en général. Par sa musique, elle veut surtout passer des messages. Et elle s’inspire des modèles et icônes tels que Rihanna, Justin Bieber, Enrique Iglesias, Neha Kakkar et Nancy Ajram. « Ceux-là sont mes artistes de tous les jours ! » clame-t-elle.

Souciant de l’avenir de la jeunesse de son pays natal, Kadi compte réaliser un projet en utilisant les réseaux sociaux. Il s’agira d’une ONG qui, selon elle, participera à l’éducation de la jeune fille. « Je voudrais soutenir les filles qui n’ont pas des ressources pour aller à l’école, car l’éducation est primordiale et cruciale », confie-t-elle.  Rassurée, Kadi nous lâche un au-revoir calmement, tout en espérant « voir [son] portrait publié bientôt ». Toujours par messages.