REPORTAGE – Pour de prétexte de mesure de sécurité, des agents de force de l’ordre postés sur les rives Chari à N’Djamena font la misère aux blanchisseurs et autres. L’accès au fleuve se monnaie entre 200 et 500 francs par individu.

À Sabangali, dans le 3e arrondissement, des blanchisseurs (communément Khassali) et quelques personnes exerçant des activités au bord du Chari sont victimes d’intimidations et de racket des forces de sécurité en faction sur les rives du fleuve. L’accès au fleuve se monnaie entre 200 et 500F par individu. Tarif imposé par les forces de sécurité.

Quotidiennement dès l’aube, des éléments du sous-poste de la Garde nomade se postent sur les pistes tortueuses menant au fleuve. Mission première : assurer la sécurité, le contrôle et d’éventuelles entrées clandestines par la frontière fluviale camerounaise. En réalité, ce n’est pas le cas. Car, les blanchisseurs et pécheurs venant vaquer à leurs occupations sont systématiquement interceptés. Les corps habillés leur exigent 200 ou 500 francs. Ceux arrivant avec des pousse-pousse doivent débourser 500 ou plus. Tout refus des usagers du fleuve est sanctionné par des menaces et un renvoi.

D’après les victimes, leurs bourreaux sont sévères et catégoriques. “Si tu cherches à te justifier disant que tu n’as pas de pièces de monnaie, ils arrachent et confisquent ton chargement. Des fois, ils te ruent de coups de (…)’’, confie un vieux blanchisseur, frottant des habits trempés de détergents au bord du fleuve. Il ajoute, résigné : “que cette pratique maffieuse perdure depuis des années et rien n’est fait (…)’’. Des propos édifiants car le vieil homme fréquente le fleuve depuis près de vingt ans.

La routine est vissée et connue. Premièrement, les corps habillés laissent que les blanchisseurs installent leur paquetage. Ensuite, ils passent encaisser leurs “droits de place’’, prétextant vaguement que l’Etat a interdit toute activité au bord du fleuve pour raisons de sécurité. Ce qui est visiblement faux. Car, à quelques pas, on peut observer des gamins batifolés dans l’eau, des hommes se baigner, des femmes faisant la vaisselle et la lessive.

Pour les blanchisseurs qui n’ont que cette activité pour joindre les deux bouts, la situation est pénible, voire critique. Ils ne savent à quel saint se vouer. “C’est avec ça uniquement que nous survivons et ils veulent encore nous en empêcher’’, se plaint de douleur, le vieux blanchisseur.