SOCIÉTÉ – Le projet de construction d’un complexe scolaire à l’hippodrome de N’Djamena ne fait pas l’affaire des sportifs. Ça fait déjà plus de cinq mois que le lieu est interdit aux footballeurs. Pourquoi ne pas délocaliser le projet sur un autre site ?

Deux vigiles en faction devant chaque entrée. Les portails sont hermétiquement fermés. Les instructions sont claires, « nul n’a le droit d’accéder au site». Le mot d’ordre est respecté à la lettre.

Ça fait plus de cinq mois que l’hippodrome de N’Djamena est défendu à toute personne. Toutes les activités à l’intérieur sont suspendues. Les enfants ne jouent plus au football là-bas, aucun club n’organise ses séances d’entrainement là-bas, plus de courses hippiques. Le périmètre qui compte pas moins de dix terrains de football et une piste de course hippique est déserté.

« Bientôt un complexe scolaire sera érigé sur ce lieu », « semble-t-il que c’est un don de la Turquie », « c’est l’Etat tchadien qui a attribué ce terrain aux turcs », se raconte à Kabalaye.  D’autres vont jusqu’à même dire que les autorités tchadiennes ont vendu l’hippodrome aux Turcs.

Il est certes vrai que la construction d’un complexe en lieu est une bonne initiative. Comme l’avait dit Victor Hugo, « qui ouvre une école ferme une prison » mais à quel prix ? Cette construction en ce lieu n’a-t-elle pas des conséquences ?  N’y a-t-il pas d’autres espaces libres pour ce projet ? Ces  questions taraudent les esprits des Tchadiens. Il se murmure qu’une pétition sera en vue pour demander la délocalisation du projet.

En effet, ça fait des décennies que des enfants du Tchad jouent au football sur ce terrain.  La preuve est que même les meilleurs Sao tchadiens ont couru derrière le ballon sur cette surface. C’est là où ils ont parfait leur art avant d’être repérés. Autrement, des champions sont nés là. Ils continueront à naître sur cette terre sacrée au football si seulement on leur laissait la porte ouverte. Peut-être qu’on aura un autre N’doram Japhet, Ngar Ezechiel, Ninga Casimir… La fermeture de l’hippodrome est comme une grossesse interrompue pour les clubs nationaux tchadiens. Il n’y aura peut-être plus des pépites pour prendre le relai.

Avant cette mesure, à 6 heures du matin ou à 15 heures, une brume de poussière couvre l’hippodrome. Des jeunes en uniforme courent dans tous les sens. De coup de sifflet résonne de part et d’autre. Des milliers de personnes viennent passer leur temps. Un véritable carrefour de brassage. Des talents s’expriment, les mérites s’ovationnent. La rivalité est légale et sans rancune. Il n’a pas discrimination ethnique et religieuse. Sur le terrain, on ne voit que le joueur. Hélas, cette ambiance ne sera plus vivable à l’hippodrome, peut-être ailleurs.