La proclamation de la République du Tchad le 28 novembre 1958 entre dans le cadre de la suite logique de la décolonisation des colonies françaises entamée après leur participation à la seconde guerre mondiale. Ainsi, de territoire, puis colonie, les terres du Tchad sont assemblées pour former la République. 62 ans se sont déjà écoulés.

« La République du Tchad c’est un morceau brut découpé au cœur de l’Afrique, sans fenêtre maritime aucune, sans débouché fluvial aucun. Son principal réseau hydrographique va se perdre dans cette mer inutile, le lac Tchad, dont ne sait même pas si elle se développe ou si elle se meurt », décrivait ainsi, une brochure de l’administration coloniale française du Tchad.

Dans le même document, on peut lire que « au sud, le Tchad commence là où finit la forêt équatoriale. Au nord, il appartient au Sahara. Son étagement climatique va ainsi de la savane boisée de type soudanais au désert, en passant par la steppe à épineux des zones sahéliennes. Le pays est aride, ingrat, difficile. Mais son potentiel humain est exceptionnel, et remarquable l’adaptation de ses hommes à leur milieu, dont ils savent tirer le maximum ».

Cette description faite du Tchad, à la fin des années 1950, prouve que l’amorce vers un nouvel statut est irréversible. En effet, après leur participation à la seconde guerre mondiale (1939-1945), les colonies d’Afrique noire, amorcent une nouvelle étape de leur statut politique. De la conférence de Brazzaville (1944) à la naissance de l’Union française, le statut politique du Tchad continue de changer, avec de plus en plus de responsabilité accordée par la France, aux quelques rares cadres Tchadiens.

Le déclic, c’est le référendum du 28 septembre 1958 organisé par le général Charles de Gaulle, père fondateur de la Ve République française, dans laquelle devrait se retrouver une Communauté pour rassembler toutes les colonies. En 1958, le territoire du Tchad comptait 2 580 000 habitants. Le jour du vote, le 28 septembre 1958, ce sont au total 823 014 électeurs qui se sont rendus aux urnes. Les résultats du vote ont donné majoritaire le « OUI » avec 804 355 et le « NON » 14 032 voix. Ainsi, les électeurs tchadiens ont voté pour faire partie de la Communauté française tout en proclamant la République, le 28 novembre 1958.

La jeune République du Tchad disposa ainsi d’une assemblée législative constituante formée le 31 mars 1959, puis de la première assemblée législative de la République élue le 31 mai 1959 et du premier gouvernement le 16 juin 1959. De ce fait, des principes fondamentaux de l’organisation constitutionnelle de la République du Tchad ont été adoptés parmi lesquels la « défense des droits de l’hommes et des libertés politiques, dans un même idéal de justice démocratique, l’instauration d’une véritable démocratie, fondée sur le système de la séparation de trois pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire), de la solidarité des Etats de la Communauté dans le sens d’une meilleure coordination de leurs objectifs économiques, sociaux et culturels ».

La constitution du 31 mars 1959 dit alors que, le « Tchad est constitué en République, Une et Indivisible, laïque, démocratique et sociale. La République est un Etat membre de la Communauté, dont la langue officielle est la langue française. Le principe de la République est le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple ». Avec la France, la République du Tchad qui venait de voir le jour a passé quelques conventions relatives, entre autres, « au concours en personnel pour le fonctionnement des services de la République du Tchad, à l’assistance technique dans le domaine de l’enseignement, relative à l’emploi du personnel judiciaire et au fonctionnement de la justice, relative au tribunal administratif et à l’emploi des personnels militaires servant en situation hors cadre ». Des protocoles signés avec la France portent sur « les conseils de révision, les commissions de recrutement, l’emploi des forces armées de gendarmerie, sur l’emploi des forces de police ».

Les jalons sont ainsi jetés. La jeune République du Tchad entame une longue vie de construction entrecoupée des soubresauts qui ont retardé son évolution dans le concert des Nations. Rébellions, guerres civiles, coups d’Etat, ont été, à un moment donné, les maux qui ont marqué la vie des Tchadiens.

Bien que la majorité des colonies françaises d’Afrique noire aient choisi de rester dans la Communauté en votant « OUI » lors du référendum du 28 septembre 1958, le général Charles de Gaulle, décida, unilatéralement d’accorder, deux ans plus tard, en 1960, l’indépendance aux colonies.

Le Tchad est passé de la période d’instabilité sous des régimes du parti unique, à celui de la démocratie avec le multipartisme, la liberté d’expression et d’opinion, l’éclosion de la société civile. Quatre constitutions ont été « consommées » dont la dernière est en cours de révision. La République du Tchad, vieille de 62 ans, se cherche-t-elle toujours un statut adéquat ?