Aujourd’hui 13 avril 2021, cela fait 46 ans que le Tchad avait connu son premier coup d’Etat pendant lequel le président Ngarta Tombalbaye fut tué. Une page d’histoire douloureuse qui marque toujours la marche politique du Tchad. Par devoir de mémoire, Tchadinfos revient sur cette journée où après 15 ans de pouvoir de Ngarta, un autre régime prend la direction du pays.

Ngarta, ex-François Tombalbaye, ce moniteur de l’enseignement, entré à l’école à presque vingt ans, aura un destin lié à cette future République. Il entama sa carrière politique au sein du PPT (Parti progressiste tchadien). Il continuera sa vie professionnelle en tant qu’enseignant, puis politique jusqu’en 1959 où il sera porté à la tête du gouvernement.

Il sera celui qui proclamera l’indépendance du Tchad le 11 août 1960. Mais, quinze ans plus tard, le 13 avril 1975, il sera tué dans un coup d’Etat perpétué par des militaires qu’il traitait de « bœufs en uniformes » dans les années 1970. Comment s’est déroulé ce putsch ?

General Felix Malloum
Le général Félix MALLOUM. En arrière plan, son état-major en uniforme. (Photo by Jean Tesseyre/Paris Match via Getty Images)

En effet, vers la fin de son règne, au début des années 1970, Ngarta Tombalbaye, devient de plus en plus méfiant vis-à-vis des militaires. Il accuse souvent ceux qu’il craignait de « complot ». Les arrestations étaient aussi fréquentes. Mais, c’est en 1975 que les signes d’un probable coup d’Etat apparaissent. Fin mars 1975, les dépôts des munitions de la Compagnie Tchadienne de Sécurité (C.T.S) de N’Djamena sont incendiés. S’en suit, le 1er avril 1975, l’incendie de dépôts des munitions de la C.T.S de Sarh.

Un autre incident intervient dans la nuit du 3 au 4 avril 1975 : des coopérants militaires français, ont été victimes d’un attentat dans le camp de la Gendarmerie de N’Djaména. Ces incidents successifs ont fait monter au créneau le président Ngarta Tombalbaye qui a procédé, une nouvelle fois, à d’autres arrestations, notamment, le commandant de la Gendarmerie Nationale colonel Djimet Mamari NGakinar et son adjoint le Commandant Kotiga Guérina Alphonse. Le président fait arrêter aussi son directeur de cabinet militaire, le général Negué Djogo.

Après ces incidents, le président Ngarta a fait trois discours entre les 6 et 8 avril 1975, dans lesquels, il est revenu avec des mots, parfois virulents, à l’encontre des officiers de l’armée. 

Coup D’Etat du General Felix Malloum. Dans une rue de N’djamena, des pustchistes, en treillis, avec un béret. (Photo by Jean Tesseyre/Paris Match via Getty Images)

 « Ce n’est pas parce qu’un coup d’État militaire a réussi dans tel ou tel pays d’Afrique, qu’un coup d’État militaire va réussir au Tchad. Notre Armée, véritable État dans l’État, se comporte fréquemment sur notre sol comme en pays conquis. Elle se conduit comme une Armée d’occupation. Nos populations se plaignent amèrement des brimades, des vols, des actions dont elles sont victimes du fait de notre armée… », disait Ngarta dans ses derniers discours.

Les observateurs politiques de l’époque estiment que, les trois derniers discours de Ngarta étaient malveillants, ne permettant pas d’apaiser la tension entre lui et les officiers de l’armée. Selon certains témoins, le coup d’Etat devrait avoir lieu entre les 10 et 11 avril 1975. Mais, le 10 avril 1975, Tombalbaye et son homologue mauritanien Mokhtar Ould Dada, se sont rendu au Cameroun pour aller fêter la réélection du Président camerounais Ahmadou Ahidjo. L’opération a, toutefois, été lancée. Le coup d’Etat est planifié et des détachements militaires devraient converger vers la capitale à partir des villes d’Amtiman, Mongo, Bokoro, Loumia et Bongor.

Ainsi, la journée du 13 avril 1975, dès 5 heures, les premiers coups de fusils et d’explosions ont été entendus par les habitants de la capitale, N’Djaména. Dans la confusion totale, la Radiodiffusion nationale tchadienne (RNT) interrompt ses émissions à cause d’une coupure d’électricité dans sa zone. Deux heures plus tard, les médias internationaux commencent à parler d’un coup d’Etat à N’Djaména. Alors que cessent les rafales et autres mitrailleuses, Radio France annonce que le président tchadien, Tombalbaye est tué dans un coup d’Etat militaire.

Coup D’Etat Of General Felix Malloum. A N’djamena, dans une salle de l’ancien ministère de la Défense, le général Felix MALLOUM, avec des lunettes, assis au bout d’une table, en réunion avec son état-major, tous en treillis de combat. (Photo by Jean Tesseyre/Paris Match via Getty Images)

Aux environs de 11 heures de la journée, la Radio Tchad reprend ses programmes en diffusant de la musique militaire. Puis, intervient la première précision sur les événements. Le général Odingar vient lire un communiqué en disant que, les forces armées ont pris leur responsabilité devant Dieu et la Nation. La Sécurité et les Intérêts étrangers seront garantis.

Le coup d’Etat a ainsi réussi, le président Ngarta a été tué. Les militaires sont désormais, les nouveaux hommes forts. Ils mettent en place, rapidement, le GROFAT (groupe des officiers des forces armées). Les officiers qui étaient arrêtés ont été libérés par leurs frères d’armes. Les militaires prennent de premières mesures en suspendant la Constitution. Ils suppriment le Mouvement National pour la Révolution Culturelle et Sociale (MNRCS). Le Conseil Exécutif et le Gouvernement sont dissouts.

Les militaires mettent en place, le Conseil Supérieur Militaire (CSM) dont la présidence est assurée par le général Félix Malloum, qui est de fait aussi chef de l’Etat.