Depuis plusieurs années, l’économie tchadienne tourne au ralenti en raison de la chute des cours du prix du pétrole en 2014. Pourtant, les indicateurs des institutions financières annoncent un retour de la croissance tchadienne. Tchadinfos.com décrypte la situation.

« Il n’y a pas d’argent », « les temps sont durs », « je suis à sec » etc. Ces phrases en vogue ces derniers temps sont prononcées au quotidien par les N’Djamenois. Et pour cause : l’économie tourne au ralenti. Dans les marchés, les commerçants peinent à écouler leurs marchandises, ces opérateurs économiques « trésor-dépendant » broient du noir. Certains soufflent même que les caisses de l’Etat sont vides. Le gouvernement et les opérateurs économiques ont du mal à s’accorder sur le montant exact de la dette intérieure. Un cabinet d’audit engagé par l’État pour chiffrer la dette n’a pas encore livré ses conclusions.

N’Djamena, la capitale habituellement bouillonnante ressemble désormais à une ville morte. En pleine journée entre 10 et 12 heures du matin, le centre-ville est quasiment désert. L’ambiance mouvementée, le ronronnement des véhicules, les vacarmes polluants des motocyclettes, l’embouteillage monstrueux au cœur de N’Djamena laissent place à une circulation fluide. N’Djamena ne reprend vie qu’à la fin de mois quand les fonctionnaires de l’État perçoivent leurs salaires.

Grise mine chez les commerçants

Les commerçants dans les marchés et quartiers fondent aussi tout leur espoir sur les salaires des agents de l’État, estimé à environ 21 milliards de FCFA. Après l’euphorie des fins de mois, la vie reprend un cours plutôt intenable pour les familles. Chacun se plaint, sans pour autant trouver des solutions. Ainsi, les cas, des personnes en panne sèche de carburant ou de crevaison, sans moyens pour se dépanner sont courants. D’autres font des situations de panne, une opportunité de mendicité. Les habitants ont du mal à “séparer le bon grain de l’ivraie”. Dans les lieux des cultes, les mendiants se livrent à une concurrence déloyale.

N’Djamena est devenu tout simplement, une ville où chacun chercher à sauver sa peau, quid de cette solidarité légendaire. Chacun y va de son commentaire. Les commerçants dans les marchés estiment qu’à ce rythme, ils risqueraient de mettre les clefs sous les palliassions.  « De fois on fait deux jours sans vendre aucun article. On consomme, nos économies. On effectue difficilement un voyage pendant l’année, alors qu’à l’époque, on fait au moins trois voyages par an. Chez les commerçants agroalimentaires, les produits périssent faute d’être vendus », explique Issa Mahamoud, devant sa boutique de vêtements, dans un couloir du marché central.

Les agents de l’État qui continuent à percevoir régulièrement leurs salaires prennent en charge, des cousins, frères et proches parents qui n’arrivent plus à joindre les deux bouts. « Dès que les salaires passent, les parents défilent. On partage le peu qu’on perçoit. Jusqu’à quand peut-on tenir ? », s’interroge Napoléon Djimasdé, un agent de l’État.

Faire faillite

Les grandes entreprises, surtout des BTP, ont déjà remercié la grande partie de leurs employés. Les chantiers publics sont à l’arrêt pour faute de paiement des factures par l’État. Pis encore, certaines entreprises déclarent faillite. Une source à la direction générale des impôts confie que plus d’une centaine d’entreprises ont plié bagage pour l’année 2018. « Nous sommes les premières victimes de la crise financière. Rien ne marche dans le pays. Il faut tenter avec d’autres horizons avec des nouvelles initiatives », analyse Tom Haroun, un chef d’entreprise des BTP.

Mais une lueur d’espoir vient éclairer ce sombre tableau. Les indicateurs des institutions financières annoncent des perspectives seront meilleures en 2019. L’État tchadien de son côté multiplie des actions pour relancer l’économie. Cette fois-ci, avec d’autres stratagèmes et mécanismes pour éviter de retomber dans la même situation. Pour ce faire, l’État opte pour la diversification de l’économie nationale. Le secteur privé tchadien, qui s’est focalisé sur les bons de commandes administratives, n’est pas solide.

Même avec les annonces faites lors de la table ronde de Paris lors du Plan national de développement (PND), le secteur privé peine à capitaliser les ressources. Les investisseurs étrangers sont encore hésitants, refroidis par un environnement des affaires qui ne semble pas être véritablement favorable. Le gouvernement estime qu’il faut valoriser les deux mamelles de l’économie tchadienne : l’agriculture et l’élevage. La nouvelle vision des autorités est de produire et transformer pour que l’économie tchadienne ne dépende plus intégralement du pétrole, une ressource jugée volatile. En attendant, les Tchadiens doivent se serrer la ceinture pour traverser cette zone de turbulence économique.