Notre compatriote Jean Pierre Baptiste, Représentant de l’Organisation Mondiale de la santé (OMS) en Mauritanie a été nommé au grade de Commandeur de l’ordre du mérite national. Notre rédaction est partie à la rencontre de ce fils de Toumaï qui se distingue hors de nos contrées. Avec lui nous avons parlé de cette distinction, mais aussi de son parcours édifiant afin d’inspirer nos compatriotes surtout les plus jeunes.

Monsieur Jean Pierre Baptiste, vous êtes nommé par le président mauritanien à titre exceptionnel dans l’ordre du mérite national de la Mauritanie, dites-nous, depuis quand vous occupez le poste de représentant de l’OMS dans ce pays ?

Oui effectivement j’ai été nommé au grade de Commandeur de l’ordre du mérite national et c’est pour moi un immense honneur qui m’a été fait par le Président de la République Islamique de la Mauritanie. J’occupe ce poste de Représentant de l’Organisation Mondiale de la santé en Mauritanie depuis le 13 juillet 2010.

Quelle est votre impression à cette distinction ?

C’est d’abord un sentiment de fierté et d’honneur. Fierté pour ma famille, pour le nom que je porte et bien sûr pour mon pays. J’ai dédié cette décoration d’abord à mon équipe du bureau de l’OMS Mauritanie, mes collègues qui ont fait le job inlassablement sur le terrain à ma famille et à mon pays.

Rappelez-nous un peu votre parcours qui vous a conduit jusqu’à la scène internationale au sein de l’OMS ?

J’ai fait mon école primaire à l’école du rond-point à Fort Lamy, puis le Lycée Félix Eboué  jusqu’à l’obtention du bac série D avec mention en1976, s’ensuivirent des études  de médecine à la faculté de médecine de Rostov sur le Don (ex URSS) de 1976 à 1983. A mon retour je fus intégré  en juillet 1983 à la fonction publique Tchadienne comme médecin généraliste, stagiaire à l’HGRN puis médecin chef des centres de santé de Farcha et Chagoua.

Etudes de spécialité en pneumo phtisiologie à l’université Bordeaux II qui se concluront par un CES dans cette discipline, je suis d’ailleurs le premier pneumologue tchadien formé et à mon retour je fus nommé donc chef de service de la médecine 3 à l’HGRN en 1989 et en même temps directeur du programme national de lutte contre la tuberculose. Simultanément avec la création de la faculté des sciences de la santé j’entamais ma carrière de jeune enseignant dans cette faculté. Le programme tuberculose m’a permis de connaitre réellement l’intérieur du pays et je peux dire que j’ai visité dans le cadre des formations et supervisions tous les districts sanitaires du Tchad de nos 14 préfectures d’antan sauf Bardai à l’époque pour des raisons de sécurité. Je continuais durant toute cette période et jusqu’à mon départ de travailler comme pneumologue à l’HGRN comme chef de service de la Med III. J’avais aussi été le délégué du Tchad dans plusieurs forums notamment à Genève dans le cadre de la convention cadre de lutte contre le tabagisme. Progressivement je fus coopté par l’enseignement supérieur d’abord comme coordinateur des études à la faculté et point focal de l’OMS, puis je fus élu par mes collègues enseignants chef de département clinique, puis doyen. Mon élection au poste de doyen de cette faculté est une chose dont j’en suis extrêmement fier, c’est une consécration dans ma carrière : avoir la reconnaissance de ses collègues est quelque chose que nous ne pouvons quantifier. Ayant eu quelques problèmes avec mon ministre de l’enseignement supérieur de tutelle je sautais sur l’occasion qui m’a été offerte par l’OMS qui cherchait quelqu’un ayant la même expérience que moi et qui connaissait le terrain avec des notions de santé publique enrobé dans un cadre universitaire. Je fus donc recruté par l’OMS en janvier 2005 pour prendre le poste de conseiller régional de lutte contre le tabagisme basé au bureau régional ou j’ai eu l’occasion de visiter une grande majorité des pays de notre région. Au fil du temps et des années j’ai passé un concours  interne pour être dans le groupe des futurs représentants communément appelé roster. Et le hasard a fait que ma candidature a été retenu pour la Mauritanie qui a donné son agrément aussi et je suis donc arrivé à Nouakchott le 13 juillet 2010 ou les mauritaniens m’ont accueilli les bras ouverts et je me suis tout de suite senti chez moi et c’est le cœur gros que je quitterai en février ce pays que je considère comme mon 2ème pays et ou je me suis réellement senti chez moi. Je suis en effet réaffecté comme représentant de l’OMS au Benin.

Quel message adresseriez-vous à vos compatriotes tchadiens suite à cette distinction ?

Le travail, l’abnégation, le professionnalisme, le savoir vivre et savoir être payent en terme de résultats dans le travail. Beaucoup de gens devraient compter sur la sueur de leur front au lieu d’être dans l’attente d’une manne qui tombe du ciel ou d’être dépendant d’un système quel qu’il soit. Je suis pour le concept demande toi ce que tu as fait pour ton pays et non l’inverse. C’est une vieille école les mentalités ont beaucoup changé depuis et c’est vraiment dommage. Ce qui est encore plus dommage c’est que l’on soit obligé de s’expatrier pour que nos mérites et nos compétences soient reconnus. Nous sommes très peu au niveau des agences du système des Nations Unies en international mais je peux vous assurer que chacun d’entre nous à son niveau même si nous ne représentons pas notre  pays dans ces agences portons haut les couleurs de la République et faisons un travail remarquable.

Si vous avez un conseil à donner à vos jeunes compatriotes faisant carrière dans le domaine de la santé, que leur diriez-vous ?

Aux étudiants de la FACSS je leur dirai tout d’abord que je suis fier d’avoir eu à diriger cette faculté, que je suis fier de voir les anciens étudiants de cette faculté occuper ces différents postes de responsabilité au ministère de la santé ou dans les formations sanitaires de la capitale ou à l’intérieur du pays. Je vous avoue que j’ai même confié à l’un d’entre eux une intervention chirurgicale concernant ma propre mère et l’intervention s’est déroulée avec brio à N’Djamena.  Vous savez on ne devient pas médecin au hasard c’est réellement une vocation. Actuellement la faculté de médecine est le principal réservoir de cadres médicaux au Tchad et c’est une grosse responsabilité. Il ne faut pas que les gens rougissent de la formation reçue bien au contraire. Il faut être fier de cette formation et à la fin de leurs études  et démontrer sur le terrain  qu’ils peuvent améliorer la situation sanitaire de nos populations, amener leur pierre à l’édifice  renforcement des systèmes de santé au Tchad. Je voudrai aussi féliciter les jeunes agrégés de cette faculté notamment le tout dernier, il se reconnaitra. Je leur souhaite le meilleur dans leur future carrière et je demanderai au Ministère de la Santé de mettre en place une politique de placement de nos cadres dans les institutions internationales car nous sommes réellement sous représentés partout dans les institutions internationales et que même de loin  nous pouvons chacun à son niveau leur prodiguer les conseils utiles et les orientations si nécessaire. Je vous remercie.