La crise sociale conduit des hommes bien portant à adopter des comportements amoraux dans la ville de N’Djamena.

Au  visage ridé et un air paisible, Hassan* descend d’une moto conduite par l’un de ses frères  sur le trottoir de l’avenue Charles De Gaulle près du marché central. Sous un air froid qui annonce la levée du soleil, motocyclistes et véhicules passent devant lui avec les vrombissements des moteurs.

L’homme à la trentaine murmure quelques phrases et sort une tasse d’aluminium de son panier qu’il tient dans sa main gauche. Regard dans tous les sens, puis commence à boiter sur son pied gauche, en traversant la voie, tasse à la main droite et panier à la main gauche.

Boutiques, ateliers, mosquées sont les coins les plus ciblés de Hassan pour demander de l’aumône. Farine, jetons quelquefois des billets de banque, Hassan les encaisse.

« C’est une stratégie qui me permet de gagner mon pain journalier. Je fais le tour des quartiers de la ville de N’Djamena, de la grande mosquée et des quartiers de la ville pour quémander. Par jour, je reçois 3 000 à 4 000F CFA, il y a aussi des jours ou je tombe sur des gens vraiment gentils et nantis, ils me donnent 5 000F ou 10 000F CFA. Ces derniers temps, les expatriés venus du Nigéria ont envahi la ville, ce qui fait qu’il est difficile même d’encaisser 2 000F », laisse entendre Hassan comme de la blague.

En réalité, cet homme est bien portant. Mais la crise sociale et économique l’a poussé à se déguiser en un handicapé mendiant. La pauvreté, la cherté de la vie et le manque d’activité sont les causes fondamentales de ce déguisement à caractère lucratif.

Dans la même veine, bon nombre de Tchadiens s’adonnent à des pratiques similaires. En occurrence les jeunes. Ils sortent le matin, se mettent dans des accoutrements bureaucratiques et prennent d’assaut les lieux administratifs et hôpitaux pour quémander de l’argent.

Certains mettent au devant des prétextes portant sur les cas sociaux tels que : les maladies, les cas d’accouchement, de décès et autres pour escroquer. D’autres se permettent le luxe d’escroquer même à l’église  et le soir se retrouvent dans les bars, cabarets et autres pour siroter de la bière.         

 « Le monsieur était venu nous trouver à l’église à 13heures. L’heure à laquelle nous comptons les offrandes, il s’est agenouillé en pleurant, et nous demande de l’aider financièrement. Car sa femme vient de rendre l’âme et n’a rien pour mettre le corps à la morgue. Nous lui avons donné de l’argent. A notre grande surprise, à 15heures, lorsque nous nous sommes mis en route pour une réunion, nous avons trouvé le monsieur au cabaret. Lorsque nous nous sommes rapprochés, il a baissé la tête et ses amis ont revelé qu’il n’est même pas marié », explique un ancien de l’église n°6.

Il est difficile à l’heure actuelle de distinguer des vrais handicapés des faux ; des mendiants nécessiteux des mendiants circonstanciels dans la ville de N’Djamena.

PS: Hassan* nom d’emprunt

Djimhodoum Serge, stagiaire