REPORTAGE – Les passagers des vols internationaux ont été placés en confinement pour éviter toute propagation du Coronavirus au Tchad. Depuis une semaine, ils tentent de s’organiser au quotidien. Sans contrôle ni accompagnement…

À l’aéroport Hassan Djamous de N’Djamena, c’est le branle-bas de combat ce 17 mars. L’un des derniers vols avant la fermeture du ciel tchadien vient d’atterrir. Les agents de l’immigration comme les équipes médicales s’affairent. Les passagers qui viennent des pays infectés par le coronavirus comme la France, l’Italie ou encore la Chine sont d’office mis à l’écart. Après avoir rempli une fiche d’information, ils sont transportés en ambulance vers leur lieu de confinement où ils vont rester pendant 14 jours conformément aux dispositions prises par les autorités tchadiennes pour limiter la propagation du virus.

Mais officieusement, une autre sélection est faite par des médecins. « Vous êtes ici chez vous, monsieur », lance un médecin à un homme franco-tchadien arrivé par un vol de Paris. Souplesse donc envers les nationaux et bi-nationaux arrivés par les mêmes vols. Ils sont conduits en groupe vers leurs lieux de résidence avec pour consigne d’éviter au maximum les contacts physiques. Les respecteront-ils ?

L’hôtel Chari a été réquisitionné par les autorités pour isoler les voyageurs dits à risque. D’autres ont été emmenés au centre d’accueil de Kabalaye (CAK). « J’étais très surprise de voir arriver l’ambulance et les gens masqués », se rappelle sœur Albertine, la responsable du centre qui affirme que les médecins ont pris les coordonnées des visiteurs ainsi que celles du personnel du CAK afin de prendre des nouvelles dans les prochains jours. « Je n’ai toujours pas reçu de message en cinq jours », souligne la religieuse. Dans les faits, aucun contrôle n’est mis en place. Ceux que l’on appelle désormais les confinés respectent, s’ils le veulent, les consignes données.

Conscients des risques, certains redoublent de prudence et ne sortent qu’en cas de nécessité absolue. D’autres voyageurs, arrivés une dizaine de jours avant la fermeture de l’aéroport, vont et viennent à leur gré car les mesures de confinement ne s’appliquent pas officiellement à eux. La nationalité y est pour quelque chose : la Suisse et l’Espagne sont moins touchées par le coronavirus que l’Italie ou la France.

Mesures strictes

Ces mesures ont été adoptées par les autorités tchadiennes à la suite d’un premier cas de personne infectée par le Covid-19 au Tchad. D’abord la fermeture des aéroports, la suspension des vols internationaux, puis dans capitale, les rassemblements de plus de 50 personnes ont été interdits, la fermeture des écoles, des lieux de culte, des bars et restaurants décidées, voire l’interdiction de circulation pour les bus et mini-bus transportant des passagers.

Le gouvernement est clair : il faut limiter la propagation du virus au Tchad. Mais dans les rues de N’Djamena, la vie poursuit son cours. Presque comme si de rien n’était. Mais au CAK, des voyageurs confinés respectent strictement les gestes barrières : port d’un masque et de gants, distanciation sociale, repas dans la chambre, désinfection des objets touchés. Pour alléger le quotidien de ces visiteurs, les sœurs ont revu à la baisse le tarif des chambres et les aident dans les courses quotidiennes.

Même difficultés de s’organiser au quotidien pour des missionnaires espagnols qui étaient venus visiter la région du Lac, confinés au CAK. C’est le cas également d’un artisan suisse de retour d’un chantier dans le sud du Tchad. “Nous sommes très bien ici“, rassure toutefois, optimiste, père Miguel, un prêtre catholique barcelonais, au téléphone avec l’une de ses connaissances. Venus en groupe, ces missionnaires passent le plus clair de leur temps journalier à lire et discuter dans la salle commune. Ils s’autorisent parfois quelques sorties, notamment pour aller chercher à manger ou se rendre aux bureaux d’Air France.

Tous les jours, ils espèrent des nouvelles de la compagnie qui doit affréter un vol spécial pour rapatrier les voyageurs. Mais faute de candidats au retour, selon la compagnie aérienne, le vol est retardé. « C’est l’incertitude, le pire : on ne nous donne pas de date exacte de départ », se désole l’un des missionnaires.

De notre stagiaire Océane Amette

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