Tchadinfos s’est entretenu avec Mahamat Moussa Bézo, le chef traditionnel de Sarh urbain, sur l’organisation de la chefferie qu’il dirige, la gestion des conflits entre les différentes communautés et l’initiative « Tous à Sarh ».

Sa majesté, faites-nous un bref historique de la chefferie traditionnelle urbaine de Sarh ?

La chefferie de Sarh urbain est une chefferie historiquement reconnue. Elle a existé depuis le temps colonial. Le premier chef fut notre grand-père, Bezo Ouldjim Oumar qui avait régné de 1897 jusqu’à son décès en 1934.

Après son décès, il y avait eu un vide juridique jusqu’à ce que le Tchad ait son indépendance. Feu Tombalbaye a, à son arrivée au pouvoir, réhabilité cette chefferie en désignant mon père à la tête de celle-ci. Mon père avait régné de 1972 à 1991. De 1991 à 2016, c’était le tour de mon grand frère qui avait succédé à notre père décédé le 2 février 1991.

Du 16 juin 2016 à nos jours, il m’est revenu la charge d’être au trône. Ceci conformément au testament déjà laissé par notre grand-père. Comme vous le savez, nous sommes dans le pays sarah, nous sommes originaires de Sarah Madjingaye et bien avant que la décentralisation ne soit mise en place, Fort Archambault coiffait le Mandoul et le Moyen-Chari. Ce qui a fait que nous avons une famille au Mandoul et aussi une famille dans le Moyen-Chari. En un mot, la famille Bezo est une famille très large et connue même au-delà des frontières nationales.

De nombreux groupes ethniques vivent à Sarh. Comment sont-ils organisés ?

Depuis sa fondation,  Sarh est une ville cosmopolite. Nous avons aujourd’hui 29 quartiers ; vous trouverez des quartiers qui sont nommés conformément aux différentes communautés qui y vivent. Vous trouverez par exemple les quartiers Baguirmi, Paris-Sarah,  Paris-Congo, Haoussa, Kassaï. Et ces quartiers ont existé depuis le temps de Fort-Archambault. Cela ne date donc pas d’aujourd’hui.

A l’époque, Fort-Archambault était rattachée à l’Oubangui-Chari et donc l’Afrique équatoriale française (AEF). C’est à partir de 1947 que Fort-Archambault est rattachée à la République du Tchad. A un passé récent, vous verrez que la population de Sarh parlait Sango.

A ce jour, nous ne comptons pas moins de 74 chefs de communauté, donc c’est le Tchad en miniature. Et nous vivons dans l’harmonie, l’entente et la paix. Nous privilégions toujours  le dialogue pour régler les conflits. Sarh est peuplée à plus de 180 000 habitants.

Comment sont gérés les conflits qui surgissent entre ces communautés ?

Dans la province, les conflits entre agriculteurs et éleveurs persistent. Là où vivent les hommes, là où vivent les animaux, il y a toujours des conflits. Et quand ça arrive, il faut savoir les gérer avec beaucoup de sagesse et d’intelligence.

Dans notre ressort territorial et dans la plupart des cas, nous mettons beaucoup plus l’accent sur la prévention et si jamais un conflit surgit, on le gère par le biais du comité qui est sur place. Ce comité paritaire veuille au vivre-ensemble et au dialogue. C’est ce qui fait notre force au niveau de notre ressort territorial.

Il s’est tenu du 27 au 31 décembre, l’initiative « Tous à Sarh ». Comment l’appréciez-vous ?

L’initiative « Tous à Sarh » est une première dans l’histoire de Sarh. En toute sincérité, Sarh est l’une des premières villes du pays. Elle était économiquement reconnue sur le plan national, sous régional et régional. Malheureusement, avec le temps, nous avons perdu cette place.

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Si aujourd’hui, les filles et fils de Sarh et tous les frères et sœurs qui ont un souvenir de Sarh décident de se mettre main dans la main pour penser à comment sauver la ville de Sarh, nous pensons que c’est un acte salutaire.

Nous demandons aux uns et autres de ne pas rester là. Comme tout un chacun s’est engagé, il faut que nous continuons sur ce même chemin, ce même élan pour pouvoir rehausser le niveau socio-économique de notre ville pour qu’elle puisse retrouver ses lettres de noblesse d’antan.

« Agir pour Sarh que j’aime » peut être notre ange sauveur. J’encourage la population à adhérer massivement à cette association qui verra bientôt le jour.

Des vœux à faire à la population ?

Une année s’achève, une autre commence. Je souhaite mes vœux les plus chers à la population de Sarh et ses environs. Et à l’ensemble des Tchadiens et Tchadiennes. Que l’année 2022 soit une année d’entente, de pardon et de paix où il y aura un décollage économique définitif pour notre cher et beau pays le Tchad.  Bonne et heureuse année à tous ! Que cette année vienne avec toutes ses opportunités.

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