SOCIÉTÉ – Au Tchad, le plastique est partout. Emballages, bouteilles ou encore gobelets en plastique envahissent N’Djamena. Un business clandestin pour certains jeunes qui organisent des collectes pour gagner de l’argent.

Au quartier Habbéna, dans le 7e arrondissement de N’Djamena, Djedouboum Agé fouille les poubelles. La chasse est fructueuse : dans ses mains, un sac baba Gana rempli à moitié des bouteilles de 33 cl, 1 litre et 1,5 litre. Un véritable trésor pour cet adolescent de 16 ans, qui vague de poubelle en poubelle, chaque jour. Et ainsi, la routine s’installe. « Je suis dans la rue depuis que j’ai 10 ans », mentionne Djedouboum Agé, les mains pleines de poussière et un t-shirt taché.

Au décès de sa mère en 2013, il se retrouve seul, faute d’un soutien familial. Il « se défend » alors pour payer ses études. Djedouboum rejoindra finalement la rue, qui est, comme le dit une maxime populaire, « la mère des démunis ». 

Les enfants de la rue à la recherche des bouteilles
Photo : archive / Tchadinfos.com

Le jeune se lance dans plusieurs petites activités comme le ramassage des ordures ménagères. Petit-à-petit, il se rend compte de la valeur des bouteilles en plastique qui inondent les rues de la capitale tchadienne. « J’ai commencé à trier les ordures et en sortir tout ce qui peut me rapporter de l’argent. Le plus souvent, ce sont les bouteilles plastiques qui me rapportent de l’argent même si ce n’est pas grand-chose », s’étale-t-il, avec nonchalance mais plein d’intérêt pour son sac comportant les bouteilles.

Mais pour les vendre, il doit absolument laver les bouteilles ramassées à la hâte. « Après le ramassage des bouteilles, nous prenons le temps de les laver avant de les vendre… », explique le jeune garçon. Il lave ses bouteilles pour la plupart au fleuve Chari mais aussi dans les points de vente d’eau avant la vente. Mais à qui ?

Aux revendeurs dans les marchés de la capitale, le prix varie entre 25 et 50 francs CFA sur le marché. D’autres « ramasseurs » comme lui les vendent à des particuliers. « Nous vendons à un jeune qui les utilise pour fabriquer des pavés. On préserve d’une manière l’environnement de la pollution », explique Ali Didda, tête baissée en train de dégager les saletés d’une bouteille de cinq litres.

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Au Tchad, la mauvaise gestion des matières plastiques reste l’une des causes principales de la pollution de l’environnement. En 2010, des mesures ont été prises par le gouvernement afin d’interdire les « leda » (emballages plastiques) dans la ville de N’Djamena. La loi adoptée en 1992 interdit l’importation de sacs plastiques au Tchad. Faute d’accompagnement des autorités, le plastique est vite revenu joncher les quartiers de N’Djamena.

Ainsi, dans les rues de la capitale, des dizaines de jeunes partent chaque jour à la recherche des bouteilles en plastique contre quelques jetons. Il est impossible d’avoir le nombre exacte faute de recensement de cette activité informelle. Mais, enfants des rues tout comme chômeurs s’y mettent. Ce recyclage clandestin est un véritable business des couches défavorisées. Un système de la débrouille qui n’est pourtant pas sans risque pour la santé.

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Pour Nodjiassem Djekodjidé, infirmière diplômée d’État, la saleté d’une manière générale augmente le risque de contracter certaines maladies. « Ces jeunes qui traînent dans les dépotoirs risquent de prendre des maladies comme le choléra. »