En prélude au dialogue national, le Comité d’organisation de ladite rencontre, organise une série de conférences-débats à N’Djaména. Au quatrième jour, le thème retenu est : « le bilinguisme au Tchad : contraintes et défis ».

L’arabe et le français sont les deux langues de travail dans l’administration et les institutions en République du Tchad. Cependant, ce bilinguisme éprouve quelques difficultés dans son application. Dr Guirayo Jéremie, président du Syndicat des enseignants et chercheurs du supérieur (Synecs), relève un manque d’enseignants, du suivi et de la rigueur dans le travail. Mais surtout, un manque de volonté de participation des lycéens. « Dans les lycées industriels, le bilinguisme n’existe pas du tout. Les nombres d’heures de l’arabe dans les écoles francophones sont insuffisantes, vice-versa ».

Dr Hassabala Mahadi, vice-président de l’université Roi Fayçal, indique que ce sont les préjugés sur la langue arabe, qui entravent l’application d’un « vrai bilinguisme ». Il cite l’amalgame entre l’islam en tant que religion et la langue arabe ; l’attribution systématique des erreurs des arabophones à la langue arabe. Pour certains, ajoute Dr Hassabala, le bilinguisme implique l’apprentissage du français et non l’inverse.

C’est un problème de volonté politique ; un manque clair d’une stratégie de l’application du bilinguisme au Tchad, observe Dr Ali Gamar, représentant au Tchad de l’Organisation islamique pour l’éducation, les sciences et la culture.

L’arabe est entré tardivement dans le système scolaire. Après son inscription dans la Constitution en 1993, elle ne sera utilisée véritablement que 20 ans plus tard, déplore Ramatou Houtouin, responsable du Centre de recherche et d’action pour le développement (Cerad). « La langue est facteur d’inclusion. Mais quand elle est mal gérée, elle peut créer des déséquilibres, des frustrations.  Le statut marginal de l’arabe dans les institutions engendre des frustrations. Ces frustrations impactent la cohésion sociale », se désole Dr Ramatou Houtouin, qui remarque une concurrence entre l’arabe dialectal et l’arabe littéraire. « Des gens qui ne sont ni francophones, ni arabophones ont été recrutés à la Fonction publique au nom de l’arabe. La  géopolitique a pris le dessus ».

L’ancienne ministre de l’Énergie interpelle le gouvernement à faire déconstruire les préjugés autour de l’arabe et à équilibrer l’application du bilinguisme.