OPINION – Chaque année, le monde célèbre le 8 mars la journée internationale des droits de la femme. Dans ce sillage, le Tchad organise la semaine nationale de la femme tchadienne (SENAFET) du 1er au 7 mars. Mais l’impression c’est qu’elle est accaparée par les citadines, les paysannes étant abandonnées à leur triste sort.

Vieilles toutes jeunes, façonnées par les conditions sévères de leur jeune vie. Tristes à tout instant, parcourant à longueur de journée des terres abandonnées par tout sauf elles, persévérantes qui extirpent de leurs entrailles un semblant de subsistance. Enveloppées des charges qui leur écrasent ce squelette vieilli de consistance juvénile, la jeunesse a fui leur enfance tendre.

Quotidiennement, la chaleur et le soleil se disputent la moindre goutte de sueur sur leur visage et la sécheresse qui a fini de circuler dans les labyrinthes d’humidité de leur corps. Leur féminité se manifeste brusquement et disparait aussitôt, traquée par l’effort qui la pourchasse tel un chasseur à la proie blessée. Pieds, mains et buste travaillés par les durs labeurs leur donnant des formes issues de l’adresse d’un sculpteur. Elles ne sont pas laides, mais à chaque instant la laideur les enveloppe comme les robes par lesquelles elles n’ont jamais été habillées ces vieilles jeunes. De l’habit, on ne peut interroger que leur intimité.

Elles marchent ces vieilles dont la jeune vieillesse est plus longue que la somme des moments de leur vie et marchent à défier les astres qui rythment les minutes de leur existence. Quand elles pleurent, elles vieillissent de plus ces jeunes dont les hommes et la nature dans un jeu toujours complice accentuent la précarité de leur survie.

Quand il leur arrive de sourire, elles donnent l’impression d’emprunter furtivement, de tricher subrepticement cette expression de la nature humaine pour aussitôt s’en débarrasser plus rapidement que les charges qui se confondent à leur anatomie. De l’amour, elles n’ont que celui de leur progéniture rivée à leurs côtes et qui un jour les quittent sans prévenir.

Tous les jours, confondant le jour et la nuit, par leurs gestes naissent des vies, reviennent à la vie des corps, arrachant ainsi à l’éternel provisoirement ses proies pour lesquelles il se noue quelque part sur terre le drame quotidien de la vie. Marchandises vendues à perte, leur destin appartient à des usuriers faiseurs de fortune sans jamais valoir juste une vie, pauvres jeunes vieillies et pourtant, c’est à vous qu’on doit le premier souffle de la vie ; insignifiantes créatures jeunes mais si vieillies.

Et puis un jour, elles rejoignent le lot des reliques humaines qui vous rappellent le crépuscule de la vie, attendant un sauveur de leur jeunesse qui ne viendra jamais, mais arrive et si tard, leur curiosité naïve sur toutes les choses simples de la vie. Puis, on se moque de votre besoin légitime de connaissance parce que vous n’avez jamais eu de répit pour regarder autour de vous, les gestes simples de la vie.

Femmes rurales, qui, qui est responsable si ce n’est ce gigolo repu en permanence sous l’ombre assoupi ? A vous l’honneur, en vous réside l’espoir pour réveiller un jour ces hordes de flémards inconscientes et endormies.

Abdel-Salam CHERIF (le titre et le chapeau sont de la rédaction)