SEXUALITE – Des causeries éducatives sont organisées par les jeunes dans les quartiers de Mao pour parler sexualité. Et briser ce grand tabou au Kanem.

La porte de taule est bien fermée pour se protéger des regards trop indiscrets. Pourtant, les rires provenant de l’intérieur de la cour ensablée de la maison font échos dans ce quartier populaire de Mao, ville située à près de 300 kilomètres de N’Djamena. Filles comme garçons sont assis, sur une natte et parlent sexe ! « Parler sexualité en public est contraire aux valeurs culturelles de cette région », confie Moustapha Mahamat Ali Yesko, l’un des pairs éducateurs de la localité qui organise des causeries éducatives.

Parler sexualité en public est contraire aux valeurs culturelles de cette région 

Moustapha Mahamat Ali Yesko, pairs éducateur à Mao, Kanem

L’importance du dépistage, les avantages de l’utilisation des moyens contraceptifs et les risques du mariage précoces sont tant des sujets qu’ils abordent dans leurs campagnes de sensibilisation. Si pour la plupart des habitants il est difficile de parler du Sida publiquement, les données médicales sont alarmantes dans la province du Kanem. Selon l’ONUSIDA, 120 000 vivent avec la maladie au Tchad.

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S’ils devient de moins en moins difficile de parler de la sexualité dans cette région à la culture musulmane, la tâche reste néanmoins pas facile pour ces jeunes. Pour faciliter leurs actions, ils tentent d’impliquer les leaders religieux :  « Ils ont compris le bien fondé de notre lutte et ils ont décidé d’en faire partie », affirme Madet Bruno, le responsable du Centre d’animation et de lecture (Clac) de Mao qui organise des sessions de dépistage du VIH Sida gratuitement. Mais pas tous… Ce jour là lors de la causerie éducative, un imam décide de ne pas rentrer dans la cour familiale, évoquant un nombre trop important de filles pour parler sexualité !

Au Clac de Mao, les jeunes peuvent se faire dépister du VIH Sida gratuitement, région du Kanem, le 28 janvier 2020, Tchad. Junior Bekoutou/Tchadinfos.

Au delà des causeries, que retiennent ces jeunes adultes dans la pratique ? L’abstinence et la fidélité seraient les deux moyens contraceptifs les plus adoptés selon Fatimé Datoloum Grâce, l’une des jeunes actifs de la province. Aussi, « les jeunes viennent souvent pour demander les préservatifs pour leur protection », murmure le responsables du Clac qui garde toujours en conserve toujours dans sa poche pour les demandes imprévues. « C’est déjà un progrès », se réjouit-il.

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