FOOTBALL – Méconnu par des Tchadiens, le défenseur central, Collyns Ambassa a séduit les supporters de l’équipe nationale de football en deux matches. Retour sur les traces de ce joueur intraitable sur son poste.

Le stade Idriss Mahamat Ouya l’avait surnommé l’Américain. Sur l’axe central de la défense des Sao, Collyns Ambassa est un parfait inconnu pour les supporters tchadiens. « D’où vient-il ? Sera-t-il à la hauteur ? Est-il meilleur Kevin Nicaise ? » s’interroge le public dans une discrétion précaire. Le jeune joueur de 23 ans ignorait qu’il est évalué à chaque touche de ballon. Qu’on doute de ses capacités à endosser le maillot national. 

Avec une blessure au talon gauche, Collyns Ambassa a chaussé ses crampons a érigé un mur de béton aux attaquants soudanais aux matches des tours préliminaires de la coupe du monde Qatar 2022. À l’issue de ces matches, le fruit du stade rennois s’est fait des fans. Des voix parlent de lui avec estime et respect comme s’il avait réussi son baptême de feu.

 « Je suis né à N’Djamena. J’ai grandi avec ma grand-mère à la frontière camerounaise, Yagoua avant de partir en France à l’âge de huit ans », nous retrace-t-il, assis au bout du lit de sa chambre d’hôtel. Dans cette suite qu’il partage avec son coéquipier et complice, Abaya Cesar, l’air est pollué des sujets de football.

Juste une année après avoir déposé ses valises en France, Collyns est repéré par le club de Reims. Il intègre le centre du club et côtoie des joueurs professionnels jusqu’à ses 19 ans. À la porte de signer en Ligue 1 avec son club formateur, le jeune défenseur centre multiple des blessures. Du coup, la confiance entre lui et son entraineur se rétrécit de fil à l’aiguille et finit par ne pas signer.

La pépite quitte le stade de Reims dents serrées pour les Etats-Unis. En Amérique, l’option de jouer exclusivement au football a été revue. Il partage, durant ses quatre années passées là-bas, son quotidien entre les salles de classe et la pelouse. Il finit par obtenir son diplôme en business et un contrat en pro, mais le défenseur abdique et fait retour à la case de départ au début mois de juillet.

“Je continuerai à toujours me donner à fond, même s’il faut mourir sur le terrain, je mourrai pour eux“.

Collyns Ambassa

En France, il regagne une équipe de 2e division avant d’être convoqué en équipe nationale, par Emmanuel Tregoat. Une première sélection et marque un retour au pays 15 ans après.

D’un tempérament timide, Collyns avoue ne pas se sentir étranger dans son pays, « en groupe ça parle souvent l’arabe ou le ngambaye, et moi je n’en sais pas trop mais ça fait vraiment plaisir d’écouter sa langue maternelle ».

“Je savais que les gens ne me faisaient pas confiance au départ”. 

Collyns Ambassa

A la question “sais-tu que les gens ont douté de toi avant le match contre le Soudan ?” 

Il lâche un rire, « Je savais que les gens ne me faisaient pas confiance au départ.  Et c’est normal, je suis un homme qui sort de nulle part, personne ne connaissait mes qualités. Je suis heureux de ce retour positif de leur part. Et moi je continuerai à toujours me donner à fond, même s’il faut mourir sur le terrain, je mourrai pour eux ».

-Aujourd’hui, on estime que tu es le digne successeur de Kevin Nicaise, ce n’est pas trop lourd pour toi ?  

« J’ai vu qu’une seule fois Kevin Nicaise joué en sélection nationale, et c’est un honneur de prendre sa place. J’ai des qualités qu’il n’a pas et vice versa. Pour l’instant, je suis là, je joue mon jeu, j’apprends d’Abaya Cesar, alors laissons le temps faire » répond-t-il dans une expression soutenue.

Si les supporters l’appellent l’Américain, dans les vestiaires, il semble être surnommé Albert Einstin. Collys Ambassa rêve attacher le brassard des Sao. Pour cela, il lui faut des années de sélection en équipe nationale afin de remplir le rôle de son capitaine Ngar Ezechiel qu’il admire à la perfection.