SOCIETE – La mendicité touche de plus en plus de personnes, inaptes ou non. Différentes raisons amènent les gens à se retrouver dans les rues. Parmi celles-ci, l’on note principalement la pauvreté. Ce phénomène, vieux comme le monde, traduit de nos jours, un mal être profond.

Les mendiants sont visibles un peu partout dans la ville de N’Djaména. Seules ou accompagnées, ces personnes démunies ciblent des passants ou des commerces pour espérer repartir avec une pitance. Une femme, borgne et âgée, assise à quelques mètres de la bourse du travail fait partie de ce lot. Comme les autres, elle compte sur la générosité des passants. Cette femme visiblement épuisée confie qu’elle n’a pas de soutien. Après avoir perdue l’un de ses deux enfants, elle avoue avoir de la peine à se prendre en charge d’où le choix de la mendicité.

Pour le sociologue Mbété Felix, la mendicité est un phénomène social. « C’est aussi une dépendance financière et matérielle, laquelle dépendance peut se généraliser. Et, elle ne date pas d’aujourd’hui. Pour certains mouvements spirituels tels que le bouddhisme et l’hindouisme, la mendicité est normale. C’est une manière pour eux de s’humilier mais en retour, ils rendent service à la société par la prière. La mendicité était au départ un ordre religieux qui s’est par la suite dépravée », explique-t-il.

De nos jours, poursuit le sociologue, la mendicité s’explique par la pauvreté et le sous-emploi. Le phénomène qui choque ici, dit Mbété, c’est la mendicité due à la pauvreté. Il évoque également « des croyances coutumières qui l’autorise. Certains enfants le font parce qu’ils sont soumis à un adulte. L’on note aussi le surendettement, l’éclatement familial, les divorces et l’alcoolisme ». Pour lui, c’est la société qui produit les mendiants. Pour ce faire, « la cause profonde est la malhonnêteté politique, ces gens qui pillent les caisses de l’Etat et détruisent l’emploi. Aujourd’hui, à tous les niveaux, on fait de la razzia, on détruit des emplois, on crée du chômage donc c’est ainsi que la mendicité est créée tout comme la prostitution ».

En 2015, rappelle le sociologue, le gouvernement a pris un certain nombre de mesures pour notamment interdire la mendicité parce que l’Etat craignait qu’on ne puisse recruter parmi ces jeunes mendiants qui dorment dans les rues. Ce sont, selon Mbeté Félix, des mesures cosmétiques parce que, justifie-t-il, l’on n’est pas allé à la racine du mal. « Tant qu’on ne mettra pas fin à ces antivaleurs précitées, l’on ne pourra pas avancer. On va continuer à produire davantage de mendiants, des prostituées, des délinquants et des criminels parce que la société est malade. Il faut des mesures politiques drastiques », soutient-il.

Ces phénomènes sont désarmants et dégradants pour une société. Il faut un réarmement moral, une société qui se nettoie. En touchant la mendicité, l’on touche d’autres aspects de la vie parce qu’un phénomène social est total lance-t-il.