N’DJAMENA, 13 mai (Xinhua) — Une partie des Forces armées tchadiennes d’intervention au Mali (FATIM), de retour de leur expédition contre les rebelles et djihadistes, ont été accueillis en héros par des milliers de leurs compatriotes, lundi matin dans la capitale.

Sur un parcours long de plusieurs kilomètres, allant du cimetière musulman de Lamadji, à l’entrée nord de la capitale, à la Place de la Nation, en face du Palais rose, le siège de la présidence de la République, les N’Djaménois se sont massés de bonne heure. Au passage de leurs “ambassadeurs au Mali”, ils scandent sans cesse “vive le Tchad”, “vive les FATIM”.

Les soldats des FATIM qui rentrent en ce jour au pays sont 500 (sur plus de 2.000 expédiés en janvier 2013 au Nord Mali pour soutenir les Français qui venaient de lancer une offensive aérienne contre les troupes rebelles et djihadistes). Ils sont juchés sur leurs chars et véhicules; avec à leur tête le général Mahamat Idriss Déby Itno, commandant adjoint des FATIM.

Dimanche, alors qu’ils campaient encore à Massakory, à 140 km au nord de N’Djaména, la capitale du Tchad, le président malien, Dioncounda Traoré, est venu leur dire, de vive voix, “merci d’avoir mis en déroute” les narcotrafiquants et les djihadistes qui ont envahi le nord de son pays.

Dès l’entrée de la ville, au niveau de la Patte d’oie, plusieurs civils montent sur les véhicules militaires, aidés par leurs frères en armes qui leur donnent la main. Militaires et civils se donnent des accolades, rient aux éclats et chantent “La Tchadienne”, l’hymne national. Certains civils se perchent même sur les engins de guerre, plastronnent devant les mitraillettes posés au-dessus.

Des conducteurs de mototaxis, communément appelés “clandomen”, et des cavaliers dans leurs plus beaux apparats, se joignent à l’impressionnant cortège militaire. Le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Hassan Sylla Bakari, annoncera à Xinhua “2.000 mototaxis et des centaines de cavaliers”.

“Cette communion est exceptionnelle. Rarement, l’on a vu des Tchadiens être fiers de leurs soldats”, affirme Abakar Djidda, la cinquantaine révolue, sur l’avenue Maldom Bada Abbas. En effet, dans ce pays d’Afrique centrale qui a connu de nombreux troubles politico-militaires, les hommes en kaki sont craints, voire honnis, par les populations civiles qui les accusent souvent d’exactions.

Après près de deux heures de trajet, les FATIM et leurs accompagnateurs arrivent à la Place de la Nation, sous une fine pluie. Sur la Place de la Nation, une marée humaine s’est formée. Des dizaines de milliers d’hommes et femmes, jeunes et vieillards arborent des écharpes et des drapeaux aux couleurs du Tchad. Des jeunes hommes portent des pantalons, des T-shirts ou d’autres gadgets militaires, ce qui est normalement interdit. Un journaliste de la télévision officielle est même habillé en treillis de la tête aux pieds, avec un gilet pare-balles par-dessus tout.

La journée du 13 mai 2013 a été déclarée fériée, chômée et payée, selon un décret présidentiel lu la veille sur la radio officielle. Deux ministères en charge de l’Education nationale ont appelé les élèves à sortir massivement à la Place de la Nation accueillir les FATIM. Ainsi, écoles, bureaux et banques sont fermés ce lundi matin. Les marchés et les échoppes dans les quartiers ont dû également lever tard leurs stores.

“C’est une affaire nationale. C’est aujourd’hui une fierté pour tout le Tchad que d’avoir contribué à la libération d’un pays frère et ami”, se réjouit le ministre de la Communication. “Comme nous avons été tous derrière les FATIM, il est important qu’à leur retour, nous sortions pour les accueillir, ces héros qui se sont sacrifié pour le Mali et qui reviennent au bercail”, explique-t-il.

Le président Idriss Déby Itno, lui, salue “l’engagement historique” des soldats tchadiens au Mali. “Tous vos frères et sœurs réunis ici à la Place de la Nation, sont fiers de vous et l’Histoire retiendra votre héroïque action au Mali”, déclare-t-il.

Il a également “une pensée pieuse” pour les 38 ayant trouvé la mort au cours des combats dans l’Adrar des Ifoghas ou lors d’explosion de bombes actionnées par des kamikazes. Il annonce que “la journée du 13 mai sera désormais consacrée au recueillement en faveur des martyrs du Mali”.

Selon le porte-parole du gouvernement tchadien, ce retour des 500 soldats tchadiens “s’inscrit dans un cadre progressif”. L’Assemblée nationale du Tchad a voté, le mois dernier, une proposition de loi demandant le retour progressif des FATIM et la contribution du Tchad à la Mission multinationale intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).

Car pour le Tchad, il n’est pas question d’abandonner le Mali dans la phase actuelle. “Nos forces de défense et de sécurité sont encore au Mali. Le gros des troupes est encore là-bas et ils contribuent à la sécurisation des grandes villes telles que Kidal et Tessalit”, conclut M. Hassan Sylla Bakari.