SOCIÉTÉ – La femme et la fille tchadiennes sont souvent victimes de discrimination et de marginalisation en matière de partage d’héritage. Cela est dû au poids de la tradition et de la religion sur l’organisation de la société et plus spécifiquement sur la gestion des affaires sociales.

Elles, c’est-à-dire les filles et les femmes représentent plus de la moitié de la population tchadienne dans son ensemble. Peu importe leur rang ou leur place dans la société, ces dernières voient souvent leurs droits violés par le sexe opposé. La plupart du temps, quand il s’agit de partager l’héritage laissé d’un parent ou un époux décédé, les filles et les femmes doivent faire face à la « dictature » des hommes, notamment des oncles paternels (cas des filles) et des beaux-frères (cas de l’épouse).

Pour le sociologue Mbeté Felix Nangbatnan, « selon les traditions, la femme ou la fille n’hérite pas. Elles sont elles-mêmes objet de l’héritage au lieu d’être héritières ». « Dans les familles où l’homme n‘a pas de garçons, ses filles n‘ont pas le droit d’hériter ses bien après sa mort, parce que c’est ses frères qui doivent tout hériter », explique-t-il.

Telle est aussi la situation dans laquelle se trouvent Gloria, ses 3 sœurs et leur mère. Deuxième enfant d’une fratrie de 4 filles, Gloria est en classe de terminale. Depuis quelques années, sa mère et ses sœurs ont  géré douloureusement la mort de leur papa. Deux mois après la mort de ce dernier, ses frères, oncles paternels de Gloria, ont décidé de déposséder sa femme et ses filles des biens qu’il avait laissés.

« Peu de temps après  l’enterrement de notre papa, ma mère et mes sœurs sont renvoyées de la maison qui nous revient de droit (…) Ils nous ont dit ostensiblement que dans leur tradition les filles n’ont pas droit d’hériter les biens de leur père (…) Malgré les efforts fournis par les femmes juristes pour nous rendre justice, la situation n’a pas changé. Jusqu’à présent, ils refusent de nous rendre les papiers de nos quatre concessions », relate Gloria, avec un pincement au cœur entre les 4 murs de sa chambre.

Ce poids de la tradition constitue un obstacle à l’adoption du code de la famille au Tchad. Car, pour la majorité de la population tchadienne, surtout traditionaliste, la femme et la fille n’ont aucun pouvoir dans la société ; par conséquent elles ne peuvent prétendre à la succession. Elles doivent garder leur statut de consommatrices et laisser la gestion des biens de la famille à l’homme. Mais que dit donc la loi musulmane par rapport à ce problème ? Réponse dans le deuxième numéro de ce dossier.