SOCIETE: Chaque 25 novembre, l’humanité célèbre la journée internationale de l’élimination de la violence faite à l’égard de la femme. A cette occasion, la rédaction de Tchadinfos trace le parcours d’une militante de l’ombre contre la violence faite aux femmes: l’avocate Koulmem Nadjiro.

Une pile de dossiers sur le bureau. Téléphones, stylos et et autres objets sont rangés pêle-mêle. Au milieu du cabinet, une femme à la paire de lunette à vitre claire taillée sur mesure. “Ces dossiers que vous voyez, la plus grande partie est constituée de plaintes des femmes battues, violentées ou séquestrées…”, pointe-t-elle du doigt. L’avocate fixe le regard sur la table et hoche la tête. “c’est tous les jours que nous recevons ces genres de dossiers“, confie-t-elle, pensive.

C’est depuis 1995 que cette auxiliaire de justice s’est engagée à défendre les femmes à la justice. “Dans ce pays, il y a des personnes vulnérables. Parmi elles, se trouvent des orphelines, des veuves, des femmes répudiées qui ne peuvent mettre pied dans un cabinet d’avocat. Celles-là, il faut les aider”, relève-t-elle.

Dans l’ombre, la quinquagénaire continue sa bataille. C’est sous les ailes de son père missionnaire et pasteur que Me Koulmem Nadjiro a fait ses premières armes. “J’ai vu mon père résoudre ces problèmes dans la cour de l’église“, se souvient-elle. A peine une licence en Droit et Technique juridique décrochée, elle rejoint un cabinet d’avocat à titre de stagiaire en 1993. Elle décide alors de se frayer son chemin.

Un tremplin qui l’amènera au devant de la défense des femmes. Elle ouvre alors son propre cabinet. A ce jour, la mère de deux enfants, et grand-mère de deux gosses gère les dossiers des femmes victimes de violences de l’ONG nationale PILC (public interest law center).

Une lutte de longue haleine

Sous sa toge ample, cette veuve considère la lutte contre la violence faite aux femmes comme un combat quotidien. ” Au pays de Toumaï, plusieurs femmes veulent être avec des hommes. Mais le plus souvent, elles sont mal accompagnées. Ce qui cause assez de violence physique, psychologique, alimentaire. Tant d’entre elles sont traumatisées“, note Me Koulmem.

En dépit de la lutte menée par beaucoup d’association notamment l’ONG PILC, l’Association des femmes juristes du Tchad (AFJT), le Focus international et autres, l’avocate chrétienne protestante trouve que la violence faite aux femmes demeure toujours d’actualité: “La problématique de la violence faite aux femmes est criante. Partout où vous allez, vous trouverez un cas de violence“.

Malgré son courage qu’elle tire dans la force de ses convictions, elle déplore le poids des us et coutumes qui entravent l’exécution des lois à l’endroit des auteurs de violences. “J’ai géré le dossier d’une fille qui a été violée à l’âge de neuf ans. Six ans plus tard, nous avons obtenu une décision à la session criminelle. Mais nous ne pouvons pas appliquer cette décision simplement parce que l’auteur du viol est un enfant naturel. Une partie de la coutume tchadienne ne reconnaît pas les enfants naturels”, indique-t-elle.

Au delà du poids de la tradition, l’orpheline de mère demande l’application des textes sur la question de la violence par les autorités judiciaires. Elle met aussi la lenteur dans le traitement des dossiers des justiciables comme l’une des difficultés. Car cela ne favorise pas la lutte. “La violence faite au femme est un grand problème dans notre société”, souligne-t-elle. Tout de même elle reste optimiste: “Le chemin est long mais nous allons continuer à nous battre“.