PORTRAIT – A la découverte d’Aliou Adoum Mbaye, un militaire dont l’alcool et les substances psychotrophes ont bousillé la carrière. Grâce au Centre diocésain de recherche et d’action en alcoologie (CEDIRA), il est passé d’état de dépendant à indépendant.
Tout a commencé à l’âge de 18 ans. C’est l’histoire d’Aliou Mbaye Adoum, un ancien opérateur radio de l’armée tchadienne. De père Ngambaye et mère Arabe, ce natif de Fort-Lamy, actuel N’Djamena, était un enfant normal comme tout autre. Issu d’une famille monogame, il est l’aîné des huit enfants que le couple a engendrés.
À 18ans, il fait son entrée dans l’armée. Et c’est là où il a commencé à découvrir l’univers d’alcool. “Mon père et ma mère n’ont jamais goûté à l’alcool, personne dans la famille ne buvait, j’ai grandi dans une famille où mes parents étaient sobres, menant une vie loin de l’alcool. Mais malheureusement pour moi, quand j’avais fait mon entrée dans l’armée , j’ai commencé à prendre de l’alcool et de la drogue“, se rappelle-t-il. Son calvaire va commencer là. “Je me suis noyé, au point où je suis devenu un accro à l’alcool et cette dernière a ruiné ma vie“, reconnait Aliou Mbaye Adoum, aujourd’hui devenu un sans emploi.
Pourtant, Aliou Mbaye Adoum était présenté comme un homme ambitieux, travailleur et rempli de bon sens. Ses compétences lui ont valu quelques postes de responsabilité dans l’armée et dans l’administration civile. Il était sous-préfet de Laï, dans la Tandjilé. Mais sa dépendance à l’alcool lui a fait tout perdre. Avec un visage qui exprime la tristesse et le regret, Aliou, aujourd’hui âgé de 45 ans, relate ce que l’alcool lui avait fait subir. “L’alcool m’a vraiment humilié, ridiculisé, j’ai perdu mon travail à cause de l’alcool. J’étais devenu un homme sans scrupule, un homme à problème. L’alcool m’a arraché le respect, il m’a rendu malade, j’étais seul, abandonné et rejeté par tout le monde, l’alcool m’a tout dépouillé“, témoigne-t-il.
Après plusieurs années dans le gouffre de la dépendance, Aliou, le toxicomane, retrouve le sourire grâce au Centre diocésain de recherche et d’action en alcoologie (CEDIRA). En fréquentant ce centre, il a subi un long processus de sevrage et de désintoxication. “Aujourd’hui, je suis à ma dixième année de sevrage, loin de l’alcool et de la drogue“, dit-il.
Le CEDIRA a su accompagner Aliou dans son processus. Aujourd’hui il est devenu un témoin vivant du sevrage et de la désintoxication. Pour lui, vouloir c’est aussi pouvoir. “C’était très difficile d’arriver là aujourd’hui mais j’ai persévéré. Je me suis donné, j’ai pris des résolutions. Grâce au CEDIRA, aujourd’hui je suis devenu un père d’une petite famille de deux petites filles. Je remercie Dieu pour cette grâce à mon égard”, exprime-t-il sa reconnaissance.
Au jour le jour, Aliou travaille d’arache-pied aux côtés de la Croix Bleue, comme le chef du groupe d’entraide pour aider les autres jeunes qui vivent dans la dépendance des produits psychotrophes.
Pour le voisinage d’Aliou Mbaye Adoum et certaines personnes qui l’ont côtoyé, c’est extraordinaire de voir ce changement. Nelson et Mariam, voisins du quartier d’Aliou, n’en reviennent pas. “Quand je vois la vie de cet homme, je comprends que Dieu existe. Il était un soulard fini, l’alcool a failli le tuer, personne n’a cru que cet homme vivra jusqu’à ce jour. Aujourd’hui, c’est un homme calme, qui a arrêté de boire d’alcool, il est respecté, il a sa famille“, raconte Nelson, d’un air ébahi.
Une maxime dit “À cœur vaillant rien d’impossible”. Aliou Mbaye Adoum l’a démontré. Aujourd’hui, il est un homme reconverti, sans sa vie loin de l’alcool, de la cigarette et de la drogue. C’est dire qu’on peut sortir de la dépendance.
Aimée Dolinassou