INTERVIEW – En moins d’une semaine, deux attaques des éléments de Boko Haram ont coûté la vie aux éléments des forces armées tchadiennes et à la population dans le département de Fouli, province du Lac-Tchad. Nous avons pu rencontrer le préfet dudit département, Adoum Mahamat Mbomi pour parler de la situation sécuritaire dans son département.

Quelle est la situation sécuritaire dans le département de Fouli ?

Fouli est le département le plus vaste de la province du Lac-Tchad. A l’ouest, il est limité par le Nigéria, au nord-ouest se trouve le Niger, à l’est se trouve la province du Kanem, au sud-est le département de Mamdi, au sud on trouve le département de Kaya.


Les membres de Boko Haram sont des ennemis qui ne peuvent pas nous attaquer en pleine journée. Ils peuvent infiltrer une équipe de 2 à 3 personnes pour attaquer la population. A ce que je sache, dans la province en général, il n’y a pas une base des Boko Haram. Ils sont basés au Niger et au Nigéria. Ils quittent leur base pour venir causer des dégâts et repartir la même nuit.

En ce qui concerne la sécurité dans le département de Fouli, nous avons quatre différentes bases militaires à savoir : Daboua, Kaiga Kindjiria, Diamarem et la base de Keremnga. Ces bases ont été installées parallèlement pour contrecarrer les ennemis. Même s’il y a des gaffes qui sont commises par des infiltrés, pour le moment la situation est stable.

Quels sont les défis sécuritaires que rencontre le département ?

Le plus grand défi reste l’incursion. Les éléments de Boko Haram pénètrent la nuit pour faufiler entre les deux bases, et venir trouver la population. Tout récemment en date du 17 février, ils ont attaqué les nomades peuls. Ils ont tué trois de nos populations. La même nuit quand les forces de défense cherchent à intervenir, ils sont repartis dans leur base.

Qu’est-ce qui explique la recrudescence des attaques dans le département ?

Quand l’État a mis la base militaire parallèlement ce n’est pas pour rien. C’est pour contrecarrer ces infiltrations. Sinon, je pense que Boko Haram actuellement n’a pas la force pour venir attaquer la base militaire. Mais les bandits armés, 2 ou 3 personnes attaquent les civils qui n’ont pas les moyens de se défendre. Notre zone est une zone opérationnelle. Et c’est le département le plus attaqué de la province. On continue à enregistrer les cas de morts. Même hier nuit il y a eu un affrontement entre les forces de défense et de sécurité et les Boko Haram. Sinon pour l’heure, le lieu que j’ai constaté qu’il y a l’insécurité c’est vers l’ouest du département.

Pourquoi la zone ouest du département constitue un danger?

Elle constitue un danger parce que la zone où l’ennemi peut sillonner donc dangereuse. Raison pour laquelle on l’a décrétée zone rouge. Donc on n’autorise pas les populations, les bergers à ne pas franchir. Et ce, dès les premières attaques de Boko Haram dans notre province.

Avez-vous un plaidoyer à faire à l’endroit du gouvernement et des autres acteurs?

À l’endroit du gouvernement, on a nos rapports qui sont là. À l’endroit des responsables humanitaires, je veux leur signifier que le département de Fouli compte assez de déplacés. Aussi, le département est touché par le désert, ce qui fait que les déplacés sont sur une terre ferme. Comme c’est une terre ferme, il est question de leur trouver quelque chose en terme d’activité surtout les jeunes. Ici on a des polders secs. S’ils peuvent valoriser ce serait mieux pour les jeunes qui n’ont pas eu la chance de fréquenter l’école. Ils ne font rien, et il faut que les responsables humanitaires trouvent quelque chose pour ceux-là afin de les empêcher d’avoir des mauvaises idées.